« Faites sortir les figurants » de Sanaz Azari

Projection en avant-première ce soir au palace de Faites sortir les figurants, documentaire de Sanaz Azari sur ce métier de l’ombre sans lequel le cinéma peinerait surement à être un tel spectacle. 

« Ils sont la toile de fond, les acteurs de rien, le bruit qu’ils émettent n’est que rumeur, leur appellation est collective. Ils sont comme les innombrables soldats inconnus du cinéma commercial … » (Extrait de Peuples exposés, peuples figurants de Georges Didi-Huberman)

Le figurant, c’est cette silhouette sans rôle, sans nom et sans voix qui traverse les décors pour que les scènes d’un film paraissent « vraies ». Autant d’archétypes fragmentant le peuple en multiples communautés. Mais qui se cache réellement derrière ces « étiquettes », quels humains, quelle part d’humanité, quel peuple?

Point de premier rôle dans ce film, de vedettes, de stars, d’acteurs et actrices de premier plan. Pas de nom familier, de nom bankable, de nom qui résonne. Juste des anonymes, des silhouettes, définies par leur costume, leur allure, et leur propension à l’invisibilité. Etre vu sans être regardé, tel est le destin du figurant.

« Faites sortir les figurants n’est donc pas un film sur les figurants, nous dit la réalisatrice. C’est un film qui va à la rencontre des fragments d’un peuple que la fiction a convoqué pour créer l’illusion du «vrai» et qui, grâce au dispositif documentaire, redonne un visage et une histoire à des hommes et des femmes « sans voix et sans histoire ». »

Alors qu’à l’image s’entassent des poupées sans vie au son d’égrène la litanie des appels au casting: « Des hommes profil Europe de l’Est. Un homme typé arabe qui jouerait le domestique d’Isabelle Huppert. Une femme entre 45 et 65 ans au visage et à l’allure disgracieuse. Il s’agira de faire un cadavre dans une morgue, prier dans une mosquée, conduire un camion. Il s’agira de danser de dos derrière Gérard Depardieu. » Les figurants, décor vivant où les humains deviennent objets accessoires de la grande histoire que jouent les héros, font écho à d’autres figurants de la marche du monde, les réfugiés qu’on laisse en arrière-plan.

Sanaz Azari est née à Ispahan (Iran) en 1981. Elle a grandi et vit à Bruxelles où, après des études de photographie, elle étudie la scénographie à l’École Nationale Supérieure des Arts Visuels de La Cambre. Parallèlement à ses études, elle a suivi, pendant trois ans, des cours intensifs de théâtre selon la méthode de Stanislavski. Elle crée des scénographies, des installations urbaines et des expositions et réalise, en 2010, son premier documentaire intitulé « Salaam Isfahan ». (prix du public à Visions du réel, Nyon) suivi de « I comme Iran » 2014 (mention au Fid de Marseille).

Faites sortir les figurants est diffusé ce soir au Palace, et sera diffusé à Mons en février prochain.

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