Il y a près de 20 ans sortait Une liaison pornographique, deuxième long métrage de Frédéric Fonteyne, avec Nathalie Baye et Sergi Lopez. Le film sera rediffusé ce mardi 5 juin à Flagey dans le cadre de l’opération 50/50, l’occasion idéale de revoir ce film marquant à bien des égards, en présence du réalisateur et du comédien principal.
Revenir à l’essentiel. L’acte pour l’acte. Les corps sur les corps, et l’âme au placard. C’est ce qu’elle cherche, Elle. C’est ce qu’il cherche, Lui. Mais ce n’est pas forcément ce qu’ils vont trouver… Car à trop vouloir ne pas s’aimer, les corps et les coeurs se rebellent. D’autant qu’une fois que le plus « dur » est derrière, une fois que la nudité est passée par là, que le sexe a été consommé, comment ne pas se sentir libéré, confortable, dans une relation où peu à peu, l’intimité corporelle laisse la place à l’intimité émotionnelle, au corps défendant des deux protagonistes?
Une liaison pornographique revient sur une histoire d’amour malgré elle, malgré lui. Elle et Lui se rencontrent par le biais d’un journal (on est en 1999, remember!) de petites annonces, Elle cherche un partenaire pour assouvir un vieux fantasme. On ne sait rien d’Elle, on ne sait rien de Lui, ils ne savent rien l’un de l’autre. Pourtant, ces rendez-vous clandestins hebdomadaires vont vite prendre une autre tournure. Ces étreintes rêvées, espérées sans conséquence, vont mener les deux héros à une liaison bien plus que pornographique, d’autant que le destin leur joue des tours, et les met face à la vie et la mort.
Le récit nous est confié en flashbacks. Face caméra, Elle et Lui se confient à un auditeur anonyme, se remémorant les grands moments de cette finalement brève liaison. Les deux versions diffèrent sur les détails, mais on sent dans leurs voix et dans leurs yeux briller la même flamme. Le film débute sur un défilé d’anonymes, au coeur de la ville. C’est une histoire banale, l’histoire de deux solitudes qui se croisent. L’histoire de deux êtres qui se cherchent, se trouvent, hésitent, se manquent. La force du film est d’inverser les pré-requis à une belle histoire d’amour. Ici, la passion charnelle se mue en passion amoureuse. Mais c’est bien connu, c’est quand on croit ne plus chercher l’amour… A l’écran aussi, les paradigmes sont inversés. Alors que la relation débute au lit, la caméra reste hors de la chambre, en scrutant les à-côtés, ce qui se dit et qui se fait hors du lit. Mais quand les sentiments font irruption, elle s’immisce soudain dans la chambre d’hôtel, jusque sous les draps. D’ailleurs quand enfin le réalisateur s’autorise à entrer dans la chambre des deux amants, le film accélère et prend un autre tournant.
Finalement, le film pose de nombreuses questions, dont celle-ci: peut-on s’aimer sans se connaître? En haut de l’affiche, de presque tous les plans, Nathalie Baye et Sergi Lopez incarnent avec grâce, profondeur et légèreté ces interrogations. Nathalie Baye a d’ailleurs reçu le Prix d’interprétation lors de la présentation du film à la Mostra de Venise. Le voile d’un regard, l’appui d’une main, les corps en disent souvent plus que les mots, ce qui tombe d’autant mieux qu’il y certains mots que souvent l’on refuse d’entendre.
Ce presque huis clos amoureux annonce un cinéma de l’intime servi par son scénario et sa science des dialogues et rehaussé par ses décors et sa réalisation, que Frédéric Fonteyne semble filer dans sa filmographie.
Une liaison pornographique sera diffusé ce mardi 5 juin à 19h30 à Flagey, dans le cadre de l’opération 50/50, en présence de Frédéric Fonteyne et de Sergi Lopez.