Rencontre avec Eric Kabongo, comédien et musicien. Actif dans le domaine de la musique depuis de nombreuses années, on l’aperçoit en 2015 dans Black d’Adil El Arbi et Bilall Fallah, dont il réalise aussi la bande originale, Black on Black. Sa carrière de comédien décolle en 2016 alors qu’il interprète le rôle principal de la comédie allemande Bienvenue chez les Hartmann, qui lui vaut d’ailleurs l’Oscar allemand du meilleur comédien. On l’aperçoit chez nous en 2018 dans Troisièmes Noces de David Lambert, et il est actuellement à l’affiche de deux films que l’on peut voir sur Netflix, Sawah d’Adolf El Assal (voir notre article), dont il tient l’un des rôles principaux, et La Terre et le sang de Julien Leclercq.
Qu’est-ce qui vous a donné envie de faire du cinéma?
Depuis mon plus jeune âge j’ai toujours été intéressé par le jeu. Enfant, au Congo, on faisait de petits spectacles à l’église déjà. Quand je suis arrivé en Belgique, je voulais devenir acteur, mais mes parents ne considéraient pas le cinéma ou la musique comme un vrai travail. J’ai dû leur démontrer le contraire. A la base, je faisais de la musique, et j’ai commencé à faire de la figuration pour m’amuser, mais aussi du théâtre en amateur. J’ai même participé à quelques programmes de télé réalité en Flandre. Les choses ont vraiment débuté pour moi en 2016 avec le film allemand Bienvenue chez les Hartmann, qui a remporté un vrai succès. C’est assez fou, le film a fait 20 millions d’entrées en Allemagne, a gagné de nombreux prix… Ensuite j’ai tourné dans Troisièmes Noces de David Lambert, puis dans Sawah d’Adolf El Assal, La Terre et le sang de Julien Leclercq, et plein de projets à venir…
Votre carrière se déploie de façon très internationale.
C’est le destin je crois, j’avais juste très envie de travailler, et je n’ai pas hésité à saisir toutes les opportunités.
Vous êtes à l’affiche de Sawah donc, qui n’a pas pu sortir en salles à cause du Covid-19, mais qui est désormais disponible sur Netflix.
Oui effectivement! C’est vraiment dommage que le film n’ait pas pu sortir en salle, j’avais très envie de voir ma tête dans les salles de cinéma flamandes (rires)! C’était une très belle expérience, ce film, de pouvoir travailler avec autant de talents, le comédien égyptien Karim Kassem, mais aussi Jean-Luc Couchard, avec lequel j’avais déjà eu l’occasion de travailler sur Troisièmes Noces, Stéphane Bissot, avec qui on s’est vraiment très bien amusés. Ou même Mourade Zeguendi, avec qui malheureusement je n’avais pas de scènes! C’est un film riche de cultures différentes et d’humour.
C’est une comédie sur un sujet assez grave…
Oui, on suit le parcours de DJ Skarab, qui débarque au Luxembourg alors qu’il se rend en Belgique pour le championnat du monde de DJing. Il se fait voler ses papiers, et la police le prend pour un réfugié. Il trouve un compagnon de route improbable en Daniel, mon personnage, un propriétaire de foodtruck haut en couleur prêt à tremper dans quelques magouilles pour survivre, étant lui-même dans une situation complexe. C’est le début d’une belle aventure.
Qu’est-ce que vous avez préféré sur ce tournage?
L’ambiance! Le collectif était hyper soudé, c’était une équipe très jeune. A un moment on en a presque oublié qu’on était sur un plateau de tournage, c’était comme qui on était au quartier en train de faire un film avec des amis.
C’est difficile pour un comédien noir de trouver sa place dans le cinéma francophone aujourd’hui?
Ce n’est pas une question que je me pose. Aujourd’hui, moi ce dont j’ai envie, c’est de jouer. On me propose des rôles, je lis les scénarios, et quand ça m’intéresse, j’accepte, c’est aussi simple que ça. Si je dois jouer dix fois un réfugié, mais que je peux le faire 10 fois de façon différente, je le ferai.
Et puis aujourd’hui, je me suis mis à écrire pour le cinéma. J’écrivais déjà des chansons, des clips, j’ai décidé d’écrire de nouveaux rôles. Je n’ai pas envie non plus de m’enfermer dans un type de personnage, je veux enrichir ma palette. Il faut créer ses propres opportunités.
Là, je viens d’enchaîner quelques comédies, et je n’avais pas envie de m’enfermer dans ce registre. Du coup, quand la proposition de jouer dans La Terre et le sang s’est profilée, un film très, très sombre, j’ai tout de suite accepté. Et puis c’était un défi intéressant, 10 jours de tournage… pour un rôle muet! Je n’avais jamais fait ça.
Comment se fait l’équilibre entre votre carrière de musicien et votre carrière de comédien?
Pour moi il n’y a pas de film sans musique, et pas de musique sans images. C’est dans leur rencontre que je me retrouve. Déjà dans mes chansons, je racontais des histoires, et j’imaginais les clips qui allaient avec. Avec le cinéma, c’est un peu comme si j’agrandissais le clip! Au lieu de raconter l’histoire en 3mn, j’ai 1h30, c’est aussi une façon d’approfondir les histoires.
Qu’est-ce que vous préférez dans le métier de comédien?
La transformation. On essaie tous de comprendre comment fonctionne le monde, les autres. C’est un bon moyen de le faire.
Quels sont vos projets?
J’ai tourné dans pas mal de projets qui sortiront bientôt je l’espère, et je suis en pleine écriture!