Public, le cinéma belge francophone veut venir vers toi

On le disait hier (lire ICI), 30 films d’initiative belge francophone sont sortis en 2015 dans les salles belges et 6 dans les salles françaises, totalisant 1.312.960 spectateurs.

Pas mal… si ce n’est que ce chiffre concerne l’exploitation des films sur l’ensemble des territoires européens où ils ont été distribués et que 84% de ce total est à mettre au crédit d’un seul film : Le Tout Nouveau Testament.

Tokyo Fiancée et Je suis mort mais j’ai des amis qui le suivent au classement, parviennent sur le podium grâce à leur sortie française.

 

 

Si on considère la Belgique seule, c’est Tous les chats sont gris  avec +/- 15000 entrées qui rafle la deuxième place (il sort le 15 juin en France), très très loin du Tout Nouveau Testament qui sur ses 1.100.000 entrées en a quand même totalisé près de 300.000 chez nous. Une sacrée performance.

 

Le problème de la rencontre entre les films belges francophones et les autochtones que nous avons déjà évoqué souvent (ce qui est normal puisque c’est ce manque de reconnaissance qui a été une des raisons majeures de la naissance de Cinevox) n’est donc pas résolu. Loin de là.

 

 

 

L’an dernier, le Centre du cinéma avait promis de mettre en place une série de réformes pour tenter d’améliorer les choses et le moins qu’on puisse écrire est qu’en 2015, sur proposition de la Ministre (Joelle Milquet, donc), un important travail a été réalisé par l’administration et les membres du Comité de Concertation du Cinéma et de l’Audiovisuel afin d’améliorer les dispositifs légaux existants.
Les points essentiels de cette réforme globale sont :

  • Réforme de la Commission de Sélection des Films pour améliorer son fonctionnement interne et son efficacité (NDLR la composition de la commission a aussi légèrement évolué, mais pas dans les proportions initialement envisagées)
    • Réforme des aides à la promotion sur base de l’évaluation des résultats du système d’aide en vigueur afin de mieux valoriser les films qui bénéficient d’une vraie sortie salle
  • Réforme des primes au réinvestissement afin de prendre en considération la diffusion dans le secteur non marchand, de mieux soutenir le documentaire et de permettre aux auteurs de bénéficier directement du système
  • Réforme de l’agrément de production afin de répondre à la demande des professionnels d’un accompagnement plus personnalisé par l’administration pour les films soutenus et également pour permettre une application plus pertinente du cadre réglementaire

 

 

Une nouvelle stratégie de promotion

 

Lors d’un précédent Bilan du Centre du cinéma et de l’audiovisuel (CCA), la Ministre de la Culture avait présenté aux professionnels de nouvelles lignes d’action pour améliorer la promotion du cinéma belge francophone. Ces propositions découlaient du constat suivant : si l’un des objectifs des aides à la promotion accordées par la Fédération Wallonie-Bruxelles – le renforcement de l’accessibilité des films – a en partie été atteint, celui de rendre les films vus ne l’a pas été.

 

Dès lors, un changement de stratégie s’est imposé. Il s’agit de développer des actions complémentaires aux aides à la promotion qui permettraient d’en accroître l’efficacité.

 

Le principe essentiel est de diminuer l’apport financier direct aux producteurs et d’augmenter la part active prise par le Centre du Cinéma de la Fédération Wallonie-Bruxelles dans la promotion des films qu’il soutient avec comme objectif premier de rencontrer un public plus large en Belgique en assurant une visibilité étendue et permanente du cinéma belge francophone.

Il faut faire venir nos films vers les gens plutôt que d’attendre que ceux-ci, confrontés à un choix très vaste en matière cinématographique, se tournent vers nos films. Et cette rencontre avec le public, le Centre du cinéma a décidé de tenter de l’organiser, lui-même.

 

Le thème de cette nouvelle stratégie de promotion détaillée en septembre 2015 au Festival International du Film de Namur peut être résumé ainsi : le cinéma belge francophone doit être présent partout et tout le temps. Il doit faire partie de l’environnement quotidien dans lequel vivent nos concitoyens et ne plus être réservé à un public d’initiés composé de ceux qui sont au courant de l’existence des films.

 

Avant de finaliser cette stratégie, l’étude sur la perception du cinéma belge francophone, réalisée en 2009, a été actualisée. Cette nouvelle étude a été présentée en septembre à Namur.

 

 

La nouvelle stratégie de promotion, coordonnée par le Centre du Cinéma, se décline selon deux axes: l’organisation d’événements de promotion vers le grand public et la présence dans les médias.

 

  • Organisation d’événements de promotion vers le grand public et la présence dans les médias
  • Organisation d’avant-premières pour les leaders d’opinion

 

L’objectif est de réunir régulièrement un groupe de privilégiés afin de leur faire découvrir en avant-première les films belges plusieurs semaines avant leur sortie officielle. Les 60 invités sont choisis, car ils disposent d’un réseau important dans leur secteur d’activité et peuvent aisément actionner le bouche-à-oreille autour de ces films.

 

Jusqu’à présent, trois avant-premières ont eu lieu, avec succès tant au niveau des invités qu’au niveau des producteurs/réalisateurs mis en valeur : Le Tout Nouveau Testament de Jaco Van Dormael, Préjudice d’Antoine Cuypers, et Les chevaliers blancs de Joachim Lafosse.

 

 

–       Organisation de séances spéciales dans les salles de proximité

 

L’objectif est de permettre au grand public de découvrir – soit en avant-première soit au moment de la sortie – un film belge francophone dans une salle de proximité (centre culturel ou salle indépendante) afin de lui donner l’occasion d’actionner le bouche-à-oreille et de vivre un instant particulier.

C’est également un moyen de valoriser ces lieux alternatifs de diffusion qui jouent un rôle important dans la carrière des films. Le réalisateur ou les acteurs sont à chaque fois présents pour renforcer l’aspect événementiel de la soirée.

 

 

Si les trois films ayant été choisis pour les avant-premières pour les leaders d’opinion ont bénéficié de ce dispositif, cela ne sera pas forcément chaque fois le cas. Ainsi, la nouvelle série TV « Ennemi public » est présentée actuellement en avant-première dans plusieurs villes.

En « année pleine », il est proposé de mener cette action pour 6 films (avec 5 avant-premières par film).

 

 

Les points positifs que l’on peut déjà tirer de cette courte expérience sont évidents :

  • la rencontre directe avec les exploitants sur le terrain,
  • la création d’un réseau parallèle pour les films belges,
  • une dynamique reprise par les distributeurs qui organisent également de leur côté des tournées sur d’autres salles en Wallonie,
  • un contact direct avec la presse locale,
  • la qualité et la pertinence des échanges entre le public et les réalisateurs.

 

 

–       Organisation d’un « événement cinéma belge » dans la foulée de la cérémonie des Magritte

 

 

 

Afin de capitaliser sur la notoriété de la cérémonie des Magritte (selon l’étude sur le cinéma belge, 75 % des Belges francophones en ont déjà entendu parler), l’Académie André Delvaux a mis en place, peu de temps après la cérémonie, une opération de ressortie des films lauréats à destination du grand public.

 

L’opération a eu lieu dès cette année, du 18 au 20 mars, et s’est concentrée sur l’ensemble des films majoritaires du palmarès (en ce compris les catégories techniques), dans 6 cinémas différents : les 3 cinémas de Kinepolis implantés en FWB (Bruxelles, Braine-l’Alleud et Rocourt), mais aussi l’Eldorado à Namur, le Movie Mills à Malmedy et le Vendôme à Bruxelles.

 

Cette opération sera reconduite en 2017, après une évaluation concertée.

 

Présence dans les médias

 

–       Partenariat avec la presse écrite et audiovisuelle

 

Afin d’assurer une meilleure visibilité des films dans les médias, un partenariat stratégique sera établi avec la presse papier et numérique.

 

L’objectif est d’assurer une présence constante et récurrente du cinéma belge francophone dans leurs pages papier et sites sous la forme à la fois d’articles de fond sur l’actualité, les tournages, les comédiens et de publicités sur les films. En lien avec les résultats de l’étude, la promotion presse devra s’axer non seulement sur les films (ce qui se fait déjà) mais aussi sur les artistes : comédiens, réalisateurs, techniciens, cadres afin de leur donner la visibilité qui leur fait défaut.

 

Le partenariat nécessitera un lien permanent avec le Centre du Cinéma pour fournir des informations allant au-delà des informations classiques déjà proposées par la presse (ex : info sur les tournages, scoops sur les futurs rôles, etc…). Ce partenariat comprendra aussi la prise d’espaces de publicité dans des rubriques autres que les pages culture, et devrait s’étendre également sur les différents médias papier et web du groupe.

 

Pour répondre à une des conclusions de l’étude de Dedicated Research concernant des actions susceptibles d’induire une plus grande consommation du cinéma belge francophone, des places de cinéma seront également offertes par ce canal.

 

Sur le papier, l’idée semble excellente. Reste à voir comment les journalistes vont accepter ce qu’ils pourraient estimer être une ingérence dans leur liberté éditoriale. Cela dit, si le Centre du cinéma vise à encourager un travail de fond, effectivement très utile, la rédaction de Cinevox sera la première à témoigner qu’il le fait sans aucune ingérence quant à la matière traitée. A suivre, donc…

En 2015 se sont aussi mises en place des réunions régulières entre le Centre du Cinéma, la RTBF et les associations professionnelles pour améliorer la promotion des films majoritaires belges sur les antennes de la RTBF.

 

 

–       Meilleure visibilité à nos films dans les salles de cinéma

 

 

 

Grâce à une collaboration avec la société Brightfish, le Centre du Cinéma et de l’Audiovisuel assure chaque semaine la diffusion de la bande-annonce d’un film belge francophone dans tous les cinémas affiliés à la régie publicitaire Brightfish, devant les films d’art et essai. Cela représente chaque semaine plus de 700 diffusions dans au moins 20 cinémas en Wallonie et à Bruxelles.

Cette action a débuté la semaine du 16 décembre 2015 avec la diffusion de la bande-annonce du film « Les chevaliers blancs » de Joachim Lafosse. En deux semaines, cette bande-annonce a été projetée 1.848 fois dans les cinémas.

Depuis 9 autres films en ont bénéficié : « Le chant des hommes », « Mirage d’amour », « Les premiers, les derniers », « Parasol », « Keeper » et « Le cœur régulier ». « Je me tue à le dire », « Baden Baden » et « Un homme à la mer » sont aussi au programme.

Jusqu’ici, box-office à l’appui, on peut dire que l’initiative n’a pas encore été couronnée d’un succès populaire. Mais on sait qu’il s’agit d’un travail de longue haleine qui ne va pas porter ses fruits en six mois.

 

Outre ses effets directs en termes de visibilité, cette initiative permettra également de perfectionner les sorties de nos films et d’inciter nos producteurs à préparer en amont leurs bandes-annonces. Par ailleurs, des formations à la réalisation de bandes-annonces seront proposées.

 

 

–    « Envahir » le web et les réseaux sociaux

 

L’étude a montré que dans les critères de choix d’un film ou d’influence, le poids des sites internet est en fulgurante augmentation (20% en 2009 pour 52% en 2015). Dès lors, outre le partenariat classique avec la presse et une présence accrue sur les sites d’actualité cinématographique liés à ces groupes de presse, une action de promotion intensive sur le web et les réseaux sociaux sera lancée, qu’il s’agisse de promotion des films ou des artistes.

 

  • Le succès des séries pour populariser nos acteurs

 

 

Grâce au fonds FWB-RTBF pour les séries belges, 2 séries ont été mises en production en 2015 (« La trêve » et « Ennemi public ») et 6 séries ont été mises en développement.
Dévoilée au public en février 2016, la Trève a connu un succès d’audience remarquable : l’ensemble de la série a réalisé une part d’audience moyenne de 22,3%, soit 363.164 téléspectateurs en moyenne.

Les gens qui ont adoré la série auront-ils envie de revoir ses acteurs phares sur grand écran ? Premier élément de réponse le 1er juin avec la sortie en salles d’Un homme à la mer, le superbe deuxième long métrage de Géraldine Doignon avec, en vedette, Yoann Blanc

La série « Ennemi Public » sera diffusée à partir du 1er mai.

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