Où ont-ils passé leurs vacances (5) ? Murgia et Murgia font le show !

David Murgia n’est plus à présenter aux lecteurs de Cinevox. C’est aussi une valeur plus que sûre dans le petit monde du théâtre.  Comme son frère Fabrice, déjà connu des (télé)spectateurs belges, qui est une véritable star sur les planches. Personne ne sera donc étonné d’apprendre que ces deux-là ont passé une partie de l’été, comme tant d’autres artistes de chez nous, dans la cité des Papes où ils semblent avoir désormais une carte de résidents permanents.

 

Par Maryline Laurin

 

 

 

 

Bête de scène sur les planches, meilleur espoir masculin aux Magritte en 2013, gueule d’ange, mais pas que; ami des policiers ixellois, David est bien sûr promis à de grands rôles au cinéma.

 

 

Geronimo de Tony Gatlif (sortie le 15 octobre en France) devrait le révéler au public et à la critique hexagonale. L’accueil  reçu par le film lors du dernier Festival de Cannes ne laisse planer aucun doute sur l’enthousiasme général.

À l’automne, il s’embarquera sur un projet qui lui tient à cœur : Les premiers, les derniers est le nouveau long métrage de Bouli Lanners dans lequel il a un grand rôle très particulier et maquant. Il y partagera l’affiche avec Bouli, Albert Dupontel ou encore Sandrine Bonnaire. De quoi dynamiter les salles.

La seule chose qui le retient de tourner sans arrêt ? Ses incessantes tournées théâtrales qui l’empêchent souvent de rejoindre des tournages qui n’attendent que lui. Nous en parlions jeudi avec un réalisateur très en vue qui désire vraiment lui offrir un premier rôle dans son prochain long métrage. Mais les dates concorderont-elles avec l’agenda de ministre de David à qui certains recommandent encore de temps en temps… de se trouver un vrai métier ?  (lire ICI)

 

Fabrice, son frère aîné, a connu jusqu’ici un parcours sans faute sur les planches. Alors qu’il a tout juste trente ans (on vous le redit, car c’était l’argument-choc de la presse durant tout l’été), son ascension fulgurante l’a conduit avec sa compagnie Artara jusqu’au In du Festival d’Avignon.

 

 [photos du selfie et du spectacle : Jean François Fernandez ]

 

Fabrice a donc vécu un été studieux et heureux. Sa nouvelle création Notre peur de n’être a été saluée par la critique internationale. Cette année, fut d’ailleurs celle de tous les honneurs.  Il a aussi reçu le prestigieux Lion d’Argent de la Biennale de Venise pour son travail d’innovation.

 

Metteur en scène en perpétuelle soif de renouvellement (photo ci-contre par Maryline Laurin) , il est actuellement en répétitions pour un projet aussi fou, qu’innovant, Daral Shaga, un opéra circassien sur le thème de l’exil. Il s’agit d’une création collective pour l’Opéra-Théâtre de Limoges qui réunit la Compagnie belge Feria Musica, Philippe de Coen pour la direction artistique, Fabrice Murgia pour la mise en scène, l’écrivain français Laurent Gaudé pour le livret (une adaptation de son roman El Dorado ) et Kris Defoort pour la musique.

 

D’abord comédien (Odette tout le monde, la série télé Melting pot café, Les jumeaux vénitiens au théâtre…), Fabrice privilégie aujourd’hui un langage qui marie les langages du théâtre et du cinéma.

 

« J’aime me rassurer et rassurer les acteurs en leur parlant comme à des acteurs de cinéma. Et ici (sur Daral Shaga), comme les acrobates ne sont pas des acteurs professionnels, ils sont beaucoup plus justes face à la caméra que quand ils doivent être dans une expression théâtrale. Je ne sais pas pourquoi, c’est un des grands mystères de l’humanité !

Une narration parallèle se joue avec l’image, avec la façon dont on filme les corps. J’aime bien quand on filme les corps, dans des films comme Flamenco, ou le docu sur Pina Bausch. La danse prend alors son sens parce qu’on rentre dans la performance. On est dans l’intime, on participe à l’effort de la danse ou de l’acrobate. L’objectif des caméras dans ce spectacle est d’amener un contrepoint, un autre point de vue. On voit le regard de la fille qui voltige et cela nous aide à ajouter du danger à la performance.  »

 

 [photo Maryline Laurin]

 

Pour sa première présence dans le In d’Avignon, Fabrice a donc investi le Festival accompagné de sa tribu, artistes et amis, issus de ses deux univers de prédilection : cinéma et théâtre. Ceci sous l’œil protecteur de son petit frère David, aussi un habitué des lieux : il a connu deux triomphes dans le Off.

 

 

En 2012, il a épaté dans Le signal du promeneur avec le Raoul Collectif (ci-dessus). Le spectacle se déplace d’ailleurs encore à travers le monde, dans les contrées les plus incroyables, avec un succès retentissant.

 

 

Et, bien sûr, il a mis tout le monde à genoux en 2013, avec son (presque) seul en scène Discours à la nation d’Ascanio Celestini (ci-dessus). Là-bas, il reçut d’ailleurs le prix du public Off et qu’il balada tout l’été de festivals en festivals de Spa jusqu’à Aurillac.

 

[Fabrice Murgia et David – archives l’envers de l’écran – RTBF]

 

Bizarrement, les deux frères n ‘ont jamais été réunis au cinéma ni sur scène , si ce n’est à l’occasion de lecture-performance lors de la création du spectacle de Fabrice, Les Enfants de Jéhovah. Cette histoire  choc, mais autobiographique, est celle de leur grand- mère qui a rejoint la secte à la mort d’un enfant et de leur père la fuyant lorsqu’il épouse leur mère.

Tout le monde se souvient de celle donnée au théâtre de la Manufacture. Ce soir fut un véritable feu d’artifice émotionnel dans la salle, avec un public en état de choc. Sur scène deux frères les larmes pleins les yeux incarnaient un texte plus qu’ils ne le lisaient. Sur l’écran, une vidéo poignante d’un enfant parlant de son désir.

 

 La galaxie Murgia (photo Maryline Laurin)

 

Présent à la Première de Notre peur de n’être… qui tombait le jour de la fête nationale belge, David ne pouvait masquer un mélange de fierté et d’inquiétude. Une angoisse totalement dissipée par la standing ovation qui suivit et la pluie de très bonnes critiques qui s’est abattue sur le spectacle de Fabrice.

 

(photo Maryline Laurin)

 

Complices, Fabrice et David ont profité de la présence d’officiels dans la salle pour remettre sur le tapis la problématique du statut des artistes. Le premier soir, Fabrice a fait venir sur le plateau une partie des artistes des compagnies belges jouant à Avignon et a lu un texte qu’il a rédigé sur la peur des intermittents. L’occasion d’attirer l’attention de la presse sur cet imbroglio qui n’en finit pas, tout en marquant leur solidarité aux intermittents français.

Fabrice Murgia conçoit des spectacles très visuels prenant pour base une écriture du réel, qui s’appuie sur l’observation en proposant un réseau d’images percutantes. Il décrit le monde virtuel actuel, en décortiquant ses avantages et ses dérives plaçant la question de la solitude au centre.

 

Dans Notre peur de n’être, le plus cinématographique de ses spectacles, il nous fait entrer dans l’existence d’un homme abandonné par sa femme après 22 de vie commune, dans celle de Gina, la mère d’une sorte de « Hikikomori » (des ados japonais qui refusent tout contact avec la société) retirée du monde dans sa chambre, ou de Sarah 20 ans, étudiante en communication qui ne sait communiquer qu’en validant chacun de ses actes par un enregistrement vocal.

 

 

Le point fort de cette pièce est une scénographie imaginative, servie par une distribution remarquable d’où émergent Magali Pinglaut qui fut l’amoureuse new âge (photo) dans le visionnaire Thomas est amoureux  de Pierre Paul Renders et Nicolas Buysse qu’on découvrira au FIFF dans Jacques a vu. Théâtre-ciné, ciné-théâtre. Indissolublement liés.

 

Nicolas Buysse à droite (Jacques a vu)

 

Fabrice et Nicolas se sont rencontrés sur le tournage d’Odette tout le monde d’Éric-Emmanuel Schmitt et se sont mutuellement invités sur leurs projets. Cet hiver, Nicolas a fait tourner Fabrice dans son premier court métrage Une brume un matin réalisé avec Joachim Weismann, produit par Bangbangfilm.

 

 

Ici encore ,une histoire de potes, un voyage entre douce euphorie et nostalgie alcoolisée. Un chemin entre les Ardennes et la Bretagne. Huit potes à la vie, à la mort… une sorte de groupe de rock en tournée, en partance vers on ne sait où… dans un camion de glace.

 

 

Font également partie de l’aventure Fabio Zenoni (Yam dam), Vincent Tavier (producteur d’Ernest et Célestine, l’homme qui meurt dans le tout dernier plan de C’est arrivé près de chez vous), Philippe Résimont (Brabançonne), Virgil Bramly, Sylvain Bouder, Michel Angelo Marchese (photo).

 

(photo Maryline Laurin)

 

Jean Michel Frère, son prof de théâtre du Conservatoire Royal de Liège était aussi présent à la réception organisée par Le ministère de la Fédération Wallonie Bruxelles et le F.F Wallonie Bruxelles International . Il y régnait une folle ambiance!

Parce que chez les Gaulois, tout se termine toujours par un grand banquet. Carpe diem !

 

 (photo Maryline Laurin)

« Notre peur de n’être », sera au Théâtre National de Bruxelles (7-16 octobre) et jusqu’en mars en tournée en France et en Belgique.

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