Vous nous connaissez, on adore être positifs en vous donnant d’excellentes nouvelles de notre cinéma. Et depuis le début de l’année, il n’y a pas à dire : la qualité des films distribués dans nos salles est épatante.
Hélas, un coup d’œil aux chiffres du box-office des films à l’affiche actuellement peut traumatiser le plus optimiste d’entre nous : malgré ces excellentes propositions, le public ne suit pas. Du tout.
Jugez plutôt : le formidable Les premiers, les derniers de Bouli Lanners a à peine attiré 10.000 spectateurs jusqu’ici, soit trois fois moins que Les Géants. Et on vous parle là du plus gros succès récent de notre cinéma belge francophone.
Les Chevaliers Blancs de Joachim Lafosse baigne sensiblement dans les mêmes eaux, loin de la performance d’A perdre la raison. Le film est pourtant réussi et interpellant et Joachim Lafosse comme Bouli Lanners ont « mouillé le maillot » en faisant la tournée des salles où leur film était présenté.
Les deux films ont aussi été exposés plus que correctement dans les médias.
Malgré ça, on peut qualifier ces chiffres de grosses contre-performances.
Parlant d’exposition, on voit mal comment un film belge pourrait être mieux mis en valeur que Mirage d’amour l’a été. Avant-premières événementielles, présence de Marie Gillain dans tous les médias imprimés, mais aussi (massivement) à la télé et à la radio, promo d‘enfer dans la foulée de la retransmission des Magritte du cinéma à Mons et Bruxelles, affiches partout dans les cinémas. Malgré ça, les spectateurs ne se sont pas déplacés au-delà des avant-premières.
Alors, certes, la critique n’a pas particulièrement aimé le film, mais la critique a-t-elle encore une quelconque influence sur le public ?
Les journalistes belges ont encensé (à raison) Keeper et Parasol et leur carrière en salles est néanmoins bien décevante elle aussi. Entre trois et quatre mille spectateurs environ pour chacun de ces excellents premiers films, c’est désolant. Keeper n’en est heureusement qu’à sa deuxième semaine d’exploitation et pourrait -doit!- accroître son capital. Non seulement il mérite que vous le voyiez mais surtout vous méritez de le voir.
Tous ces films ont pourtant été diffusés par des distributeurs qui connaissent leur affaire.
Au-delà, des longs métrages majoritairement produits chez nous, la déception vaut aussi pour des comédies comme Des nouvelles de la planète Mars (avec François Damiens et Veerle Baetens) qui devrait terminer sa carrière autour de 4000 ou 5000 spectateurs, Moonwalkers (avec Erika Sainte et Tom Audenaert) dans les mêmes eaux ou Saint-Amour (avec Benoit Poelvoorde) qui n’atteindra pas les 10.000 spectateurs.
Quand le film est bon, la distribution professionnelle et la promo efficace, quand on sait que le Centre du cinéma a déjà mis en place des réformes volontaristes pour booster la promo et la distribution, où faut-il chercher la solution du problème ?
Côté flamand, la chanson est évidemment fort différente : Achter de Wolken, une love story pour cinéphiles d’âge mur est une réussite avec déjà plus de 100.000 spectateurs, comme Helden van de zee. Seul Belgica déçoit malgré un tapage médiatique important : on serait surpris qu’il atteigne les 75.000 spectateurs ce qui pour le successeur de The broken circle breakdown est très peu. Comme tout est relatif, Broer avec 70.000 entrées en vue est, lui, plutôt un succès.
Pour les films issus de séries très populaires, le nouveau volet de Mega Mindy approche des 200.000 spectateurs, tandis que Safety first a dépassé… les 600.000 tickets vendus.
Bref, si on fait abstraction du triomphe isolé du Tout Nouveau Testament qui est l’arbre touffu qui cache la forêt décharnée, on se retrouve à nouveau devant une Belgique a deux vitesses. Et la qualité des films n’a rien à voir là-dedans.
Interpellant…
PS Hier soir, nous avons vu via Google analytics que quelqu’un lisait un des premiers articles publiés sur ce site, expliquant les tenants et aboutissants de sa naissance, ses intentions (lire ICI).
Quasi cinq ans plus tard, ce nouvel article nous ramène un peu à la case départ.
Et la conclusion est toujours la même…