Benoît Poelvoorde est à l’affiche de Normale d’Olivier Babinet (Swaggers, Poissonsexe), dans le rôle d’un père dépassé et atteint, qui surnage tout juste pour épargner sa fille. Un teen movie doux-amer aux accents anglo-saxons, porté par l’interprétation et la belle connivence du comédien belge et de la jeune comédienne Justine Lacroix, découverte dans C’est ça l’amour.
L’histoire? Lucie a 15 ans et une imagination débordante. Elle vit seule avec William, son père, qui, sous ses abords d’adolescent attardé, lutte contre la sclérose en plaques. Entre le collège, un petit boulot et la charge du quotidien, Lucie gère tant bien que mal, et s’échappe dans l’écriture d’un roman autobiographique fantasque, qui navigue entre rêve et réalité… L’annonce de la visite d’une assistante sociale va bousculer cet équilibre précaire. Lucie et son père vont devoir redoubler d’inventivité pour donner l’illusion d’une vie normale.
Ça commence par une voix off, comme dans un film américain. Dans son cher journal, Lucie se rêve une autre vie, où un brillant inconnu, un pygmalion providentiel, par exemple, un réalisateur américain célèbre, la sortirait de son marasme, repérant là, dans la station Shell où elle vend des sandwichs son étincelant talent. Il faut dire que la vie de Lucie n’est pas toujours rose. A la maison, elle signe les chèque, elle compte les pilules, elle relance les courriers en retard. A l’école, on ne peut pas dire que règne une franche camaraderie. Elle devient malgré elle comme le parent de son père.
Quand le petit monde fragile qu’elle s’est créé avec son père malade est remis en question par l’enquête d’une assistante sociale, elle va se trouver un allié inattendu à l’école, Etienne, qui va l’aider mettre sur pied la fragile illusion d’une famille fonctionnelle.
Derrière ce subterfuge, c’est aussi l’éducation sentimentale de Lucie que l’on suit, qui va devoir apprivoiser sa féminité sans modèle maternel, là encore sous le regard complice d’Etienne. Alors que se joue son avenir familial, « la fête du printemps » qui s’annonce à l’école la renvoie à son âge, le vrai, et les tourments de l’adolescence qui vont avec.
C’est un portrait de jeune fille tendre sans être mièvre que livre Olivier Babinet, avec ce qu’il faut d’acidité pour piquer là où la vraie vie fait souvent mal. Justine Lacroix est aussi bornée, parfois même renfrognée que lumineuse, alors que Benoît Poelvoorde joue à merveille les hommes blessés et faillibles, profondément aimant mais luttant contre une nature désabusée. A voir dès ce mercredi dans les salles.