Magritte du cinéma 2012
Quartier (pas si) Lointain

Magritte 2012 : tous les favoris sont là ! Mais derrière Les Géants (12 nominations), Rundskop (9), Le Gamin au Vélo (8), et au niveau de la Fée (5), on pointe la belle surprise de ce premier tour : Quartier Lointain, troisième long métrage de Sam Garbarski. Notre étonnement n’a rien à voir avec la qualité de l’oeuvre qui est originale, poignante, très maîtrisée, fort réussie. Mais Quartier lointain est le film du quintet qui a été le moins vu et médiatisé. Jusqu’ici. Et s’il créait la sensation?

 

Les Magritte approchent et l’excitation croît dans les cénacles professionnels. Pour cette deuxième édition qui se déroulera le 4 février au Square à Bruxelles et sera diffusée en clair sur BeTV, les attentes sont importantes. Cette manifestation, nous la guettons aussi avec énormément d’impatience: les Magritte et Cinevox sont sur la même longueur d’onde. C’est d’ailleurs confirmé : nous consacrerons le grand écran n°2 de 2012 à un fulgurant résumé (2′ chrono) de la remise des récompenses.

 

 

D’ici le samedi magique, nous reviendrons à plusieurs reprises sur les enjeux des Magritte, nous nous essayerons au jeu des pronostics et, surtout, nous dresserons le portrait de quelques candidats au titre. Pas tous. Le site des Magritte fait ça très bien, au jour le jour, avec objectivité et un vrai sens du suspense. Nous vous conseillons de rejoindre la page Facebook des Magritte et de jeter un coup d’œil quotidien sur le site. Chaque jour un ou deux nouveaux articles y sont publiés. Nous épinglerons par contre, les inattendus, ceux dont nous n’avons pas encore beaucoup parlé. Des films qui, par exemple, étaient sortis avant notre arrivée sur la toile.

 

Derrière les quatre blockbusters de l’année, forcément invités à la fête, le principal invité-surprise est donc Quartier Lointain, adaptation inspirée d’un manga à succès pour le scénario duquel Jiro Taniguchi fut couronné au festival d’Angoulême en 2003.

De la BD au film, il y a évidemment un énorme pas qu’a franchi un trio de scénaristes : Philippe Blasband (nominé pour les Emotifs anonymes), Sam Garbarski et Jérome Tonnerre. Un travail d’orfèvre, inventif qui a reçu l’aval de l’auteur de l’œuvre originale qui a d’ailleurs assuré la tournée de promotion du film avec son nouveau copain, Sam. Et qui surgit dans le film, signant une apparition digne de Sir Alfred.

Hors la transposition géographique et les inévitables modifications liées au contexte culturel, le pitch du film est assez proche de celui du livre : par un curieux caprice du destin, Thomas, la cinquantaine, père de famille, échoue dans la ville de son enfance. Pris d’un malaise dans le petit cimetière local, il se réveille quarante ans plus tôt, dans son corps d’adolescent. Dans ce passé qu’il vit avec la conscience de sa vie écoulée, il va non seulement retrouver son premier amour, mais aussi chercher à comprendre les raisons du mystérieux départ de son père. Mais peut-on changer son passé en le revivant ?

 

 

Une question qui, par extension, donne : avec une rafale de Magritte, Quartier Lointain pourrait-il rencontrer le public?

 

Car lors de sa sortie en salles, Quartier Lointain n’a donc pas été couronné du succès attendu. Le film avait pourtant fait l’objet d’une belle promotion. On l’a même vu au journal de TF, quelques jours avant sa sortie et la presse dans son ensemble a été assez positive :

Ainsi Olivier Séguret dans Libération, par exemple (mais ce n’est qu’un exemple parmi beaucoup d’autres)  disséquait le contenu avec beaucoup de passion: « Jamais le propos de Quartier lointain n’est de profiter des effets pittoresques qu’un tel dispositif rend pourtant tentants. Ce retour vers le passé, armé d’une conscience qui réfléchit au futur antérieur, regorge de failles et abymes où enivrer le spectateur. Mais c’est autre chose qui se produit : Sam Garbarski traque plutôt un suspense sentimental, un secret tendre, suspendu à la durée inconnue de cette expérience. Jusqu’où cette seconde enfance sera-t-elle donnée à Thomas ? Aura-t-il le temps d’intervenir et d’empêcher son père de les quitter ? Grâce à l’élégante fluidité de sa mise en scène, à l’excellente musique ambiancée par Air (binôme décidément très adéquat au cinéma) et à la remarquable prestation du jeune Léo Legrand, sur lequel repose tout le risque du film, Quartier lointain parvient à donner une consistance crédible et émouvante à cette idée que l’on a tous eu le désir un jour de vouloir prévenir, et préventivement réparer, les douleurs du passé. »

 

 

Si le film n’est pas nominé aux Magritte dans la catégorie « meilleur film », supplanté en tant qu’outsider par le tout aussi surprenant Beyond the Steppes (nous y reviendrons), Sam Garbarski sera opposé à Bouli Lanners, aux frères Dardenne et au trio Abel, Gordon et Romy dans la lutte pour la « meilleure réalisation de l’année ».

 

Mademoiselle sa fille, Tania Garbarski, madame Charlie Dupont donc, est nominée dans la catégorie « meilleure actrice dans un second rôle »: chrono en main, Tania est celle qui, parmi les quatre heureuses élues, fait la plus brève apparition à l’écran. Preuve que son efficacité moyenne est redoutable et qu’elle ne part pas battue d’avance contre Virginie Efira, Marie Kremer ou Gwen Berou. Jonathan Zaccaï l’a bien compris lui offrant une participation désopilante dans son JC comme Jésus-Christ.

 

Jonathan, justement, est en lice pour le Magritte du meilleur acteur de l’année. Son plus grand adversaire? Lui-même ! L’an dernier, ce comédien hors pair a déjà gagné la précieuse statuette (avec ou sans pile) pour sa prestation dans Elève Libre de Joachim Lafosse. Face à Matthias Schoenarts, Dominqiue Abel et Benoit Poelvoorde, ce sera un petit handicap psychologique. D’autant qu’il n’est ici qu’un des trois rôles principaux masculins avec Pascal Greggory et le jeune Léo Legrand.

 

 

Les deux autres nominations de Quartier Lointain sont pointées dans les catégories techniques.

Nommée dans la catégorie « meilleurs décors », Véronique Sacrez a été révélée par Une Liaison Pornographique. On la retrouve ensuite sur une foule de longs métrages belges comme La Femme de Gilles, Irina Palm, La Régate ou Miss Montigny. Sur le film de Sam Garbarski, elle a dû composer avec une coproduction internationale complexe et a finalement réussi un coup de maître(sse) : on garde de Quartier Lointain une série d’images fortes, des rues improbables, des décors époustouflants.

Les costumes rétro de Quartier Lointain ne sont pas pour rien non plus dans le charme intemporel du film de Sam Garbarski. Déjà remarquée sur Sœur Sourire, Florence Scholtes a aussi à son palmarès. L’an dernier, elle a d’ailleurs partagé un Magritte avec Christophe Pidre pour ce travail remarquable. Cette fois, c’est en solo qu’elle se présente sur la ligne de départ.

 

 

Cinq nominations et comme on le voit, un vrai potentiel…

Quartier Lointain sera-t-il au final la grosse surprise des Magritte? Alain Berenboom le pense peut-être encore, lui qui évoqua le film dans une chronique du Soir consacrée à l’avenir du cinéma et à l’émergence de la 3D. Une réflexion qui se concluait par un post-scriptum qui concerne directement notre sujet du jour : « PS. le film de la semaine s’appelle Quartier lointain, signé Sam Garbarski : il n’est pas en 3 D ; il va plus loin encore : il nous plonge dans la quatrième dimension ! Et c’est superbe, drôle et émouvant. Cerise sur le gâteau, c’est belge ! Oui, belge ! »

 

 

Complément d’infos :

Lire aussi :  Quartier Loin, si loin si proche.

Article lié : Monsieur Papa

 

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