Cette 11e édition des Magritte du Cinéma s’annonce pleine de suspense et de rebondissements!
Après une année de pause forcée Covid oblige, les prétendant·es au titre étaient plus nombreux·ses que jamais, et la liste des nominations si elle appuie la côte d’amour de la profession pour une poignée de films, n’aide pas particulièrement à établir des pronostics infaillibles. Bien malins celles et ceux qui auront le tiercé dans l’ordre, pardon, le palmarès. Une vie démente et Un monde, premiers films 100% belges, affichent un impressionnant nombre de nominations, respectivement 12 et 10. Cela s’explique, outre l’évidente qualité des films, par le fait que tous les postes techniques et artistiques ou presque soient tenus par des talents belges.
Les deux films ont d’ailleurs déjà en grande partie fait leurs preuves. Après une sortie retardée par les confinements successifs, Une vie démente a enfin pu rencontrer son public à l’automne dernier en Belgique et en France, mais aussi dans le monde entier, parcourant les festivals, engrangeant les prix. Le bouche-à-oreille fonctionne à plein, auprès d’un public touché par le destin de Suzanne, l’héroïne du film, atteinte d’une maladie neuro-dégénérative, et qui après un temps d’adaptation, est prise en charge avec bienveillance et fantaisie par ses proches.
Avec Un monde, Laura Wandel, pour un coup d’essai, pose un coup de maître. Lui aussi retardé dans sa sortie, il débute sa carrière en fanfare avec une prestigieuse sélection à Cannes dans la section Un certain regard. Le film enchaine lui aussi les prix et les sélections. Ce récit à hauteur d’enfant qui plonge le spectateur dans une cour d’école primaire, où règnent des codes tacites souvent dictés par la violence et les relations de domination, a également été choisi pour représenter la Belgique aux Oscars.
Juste derrière en nombre de nominations, on retrouve deux cinéastes largement confirmés. Adoration de Fabrice du Welz et Les Intranquilles de Joachim Lafosse totalisent chacun 6 nominations, dont Meilleur film et Meilleure réalisation.
Le premier livre avec Adoration un film où l’on retrouve son approche très organique du cinéma, ainsi qu’un sens de la direction artistique toujours très affuté, mais qui emmène son cinéma vers des contrées plus intimes, par la grâce de deux jeunes comédiens qui illuminent l’écran, Thomas Gioria, et la jeune comédienne belge Fantine Harduin.
Joachim Lafosse revient lui aussi à un cinéma de l’intime puissant et bouleversant avec Les Intranquilles, qui lui vaut sa première sélection en Compétition à Cannes. Porté par deux comédiens en état de grâce, Leïla Bekhti et Damien Bonnard, le film est un véritable tourbillon émotionnel, qui explore la possible survie de l’amour face aux défaillances du couple.
Dans la catégorie Meilleur film, on retrouve également Filles de joie de Frédéric Fonteyne et Anne Paulicevich, nommé 3 fois, outsider de luxe. Sorti en février 2020, le film représentait lui aussi la Belgique dans la course aux Oscars.
Alors, qui des newbies que sont Laura Wandel, Ann Sirot et Raphaël Balboni, ou des habitués que sont Joachim Lafosse, Fabrice du Welz, Frédéric Fonteyne et Anne Paulicevich tireront leur épingle du jeu? Drôle d’opposition, qui souligne néanmoins la grande vitalité, malgré des circonstances difficiles du cinéma belge ces deux dernières années.
Le bal des comédien·nes
Evidemment, les autres catégories phares qui seront scrutées par le public sont celles du Meilleur acteur et de la Meilleure actrice.
Dans cette dernière, on retrouve une hyper-habituée de la catégorie. La toujours impeccable Lubna Azabal a déjà remporté deux fois la statuette pour Incendies et Tueurs. Elle est en lice cette année pour Adam, très beau premier film de Maryam Touzani. Face à elle, une autre favorite des Magritte, et bien plus encore, Virginie Efira concourt pour Adieu les cons d’Albert Dupontel, qui a presque tout raflé sur son passage aux César. Deux valeurs sures donc. Face à elles néanmoins, on retrouve les deux héroïnes d’Une vie démente. Lucie Debay connaît bien les Magritte du Cinéma. Elle a déjà remporté celui du Meilleur espoir, et de la Meilleure actrice dans un second rôle. Elle fait preuve une fois de plus de son grand talent dans Une vie démente, mais gageons néanmoins que si les professionnels devaient primer l’une des héroïnes du film, ce serait peut-être bien Jo Deseure, actrice rare au cinéma, qui prend en charge avec un engagement et une fraicheur détonnantes le difficile rôle de Suzanne.
Chez les hommes, on retrouve Bouli Lanners pour Cette musique ne joue pour personne de Samuel Benchetrit. Il y est fidèle au talent qu’on lui connaît, mais a déjà gagné ce même prix l’année dernière. On imagine donc que le Prix se jouera plutôt entre ses trois concurrents. 2022 sera-t-elle enfin l’année de Jérémie Renier? Déjà nommé à deux reprises dans la catégorie Meilleur acteur, il ne l’a encore jamais remportée (mais il s’est vu décerné deux Magritte du Meilleur acteur dans un second rôle). Son impressionnante prestation dans Slalom de Charlène Favier pourrait bien lui permettre de débloquer le compteur. Arieh Worthalter à lui aussi deux Magritte du Meilleur second rôle à son actif, pour Girl et Duelles. Primé lors des deux dernières éditions, viendra-t-il confirmer l’adage « jamais deux sans trois »? Il est en tous cas bouleversant dans Serre-moi fort de Mathieu Amalric. Tout comme Jean Le Peltier dans Une vie démente, l’outsider qui pourrait bien tiré son épingle du jeu du fait qu’on imagine que tous les votant·es auront vu Une vie démente, et pas forcément les trois autres films français concernés.
Chez les espoirs, on notera le niveau particulièrement élevé de la compétition, mettant en lumière des performances remarquables et remarquées, celles de Yoann Zimmer dans Des hommes, Daphné Patakia dans Benedetta, Salomé Dewaels dans Illusions Perdues ou encore les très jeunes comédiens d’Un monde, Maya Vanderbeque et Günter Duret. Sans préjuger de ce qu’auront estimé les membres de l’Académie, on soulignera néanmoins la présence de deux jeunes comédien·nes déjà nommé·es par le passé dans cette catégorie, et qui une fois de plus ont su d’emparer de leur rôle avec grâce et intensité, qu’il s’agisse de Fantine Harduin dans Adoration, ou Basile Grunberger dans SpaceBoy.
Côté doc, côté court
Cette année pour la première fois sera remis un Magritte du Meilleur court métrage documentaire. On ne s’avancera pas sur le résultat de cette catégorie, ni d’ailleurs sur celui du Magritte du Meilleur documentaire, qui comme on dit, envoie du lourd avec 4 films très différents, qui ont su chacun avec leurs forces et leurs atouts rencontrer leurs publics, 4 films dont on vous a d’ailleurs beaucoup parlé, qu’il s’agisse de #SalePute, Chasser les dragons, Ma voix t’accompagnera ou Petit Samedi.
Quant à la catégorie court métrage de fiction, on ne peut s’empêcher de se demander si Hélicotronc, société de production saint-gilloise experte en la matière (mais qui se distingue également cette année en produisant Une vie démente) remportera son 6e prix d’affilée! Oui, sixième, après L’Ours Noir, Le Plombier, Avec Thelma, Icare et Matriochkas. Les probabilités qu’ils l’emportent sont d’autant plus élevées qu’Hélicotronc a deux films en lice cette année, Sprötch de Xavier Seron, cinéaste chouchou de la catégorie, et Titan de Valéry Carnoy. Mais ils auront fort à faire avec le niveau élevé de la concurrence, entre L’Enfant Salamandre de Théo Degen, Prix de la Cinefondation à Cannes, et T’es morte Hélène de Michiel Blanchart, qui travaille actuellement sur un remake américain version long métrage du film, rien que ça!
Et les autres prix?
On relèvera que si l’on retrouve logiquement dans la catégorie Meilleur premier film les incontournables Un monde et Une vie démente, ils feront face à deux autres premiers films plus discrets dans la liste des nominations, mais qui ont su s’imposer par leur singularité, qu’il s’agisse de Jumbo de Zoé Wittock, ou Fils de plouc de Lenny et Harpo Guit.
On notera également la 6e nomination de Manu Dacosse pour le Magritte de la Meilleure image, qu’il a déjà remporté à 3 reprises, notamment pour Alleluia de Fabrice du Welz en 2016. Cette nouvelle collaboration, toujours aussi fructueuse avec le cinéaste pour Adoration, qui lui vaut cette nouvelle nomination, pourrait bien également lui valoir une nouvelle statuette, même si le travail de Ruben Impens sur Titane et Frédéric Noirhomme sur Un monde contribue grandement à la réussite de ces deux films. On retiendra d’ailleurs que Titane, la Palme d’Or de Julia Ducournau, est nommé 4 fois, grâce à la belgitude de son équipe technique. Si le film fait autant d’effet à l’Académie que son film précédent, Grave (Magritte du Meilleur film étranger en coproduction et des Meilleurs décors), on pourrait bien le retrouver au palmarès.
Et vous, vous pariez sur qui?
Rappel des nominations:
MAGRITTE DU MEILLEUR FILM
- Adoration de Fabrice Du Welz, produit par Vincent Tavier (Panique !)
- Filles de joie de Frédéric Fonteyne et Anne Paulicevich, produit par Jacques-Henri Bronckart (Versus Production)
- Les Intranquilles de Joachim Lafosse, produit par Anton Iffland Stettner et Eva Kuperman
(Stenola Productions)
- Un monde de Laura Wandel, produit par Stéphane Lhoest (Dragons Films Productions)
- Une vie démente d’Ann Sirot et Raphaël Balboni, produit par Julie Esparbes (Hélicotronc)
MAGRITTE DU MEILLEUR PREMIER FILM
- Fils de plouc de Harpo et Lenny Guit, produit par David Borgeaud et Erika Meda (Roue Libre Production)
- Jumbo de Zoé Wittock, produit par Annabella Nezri (Kwassa Films)
- Un monde de Laura Wandel, produit par Stéphane Lhoest (Dragons Films Productions)
- Une vie démente d’Ann Sirot et Raphaël Balboni, produit par Julie Esparbes (Hélicotronc)
MAGRITTE DE LA MEILLEURE RÉALISATION
- Adoration : Fabrice du Welz
- Les Intranquilles : Joachim Lafosse
- Un monde : Laura Wandel
- Une vie démente : Raphaël Balboni, Ann Sirot
MAGRITTE DU MEILLEUR FILM FLAMAND
- Dealer de Jeroen Perceval, produit par Bart Van Langendonck et Sarah Marks (Savage Film) et coproduit par Joseph Rouschop et Valérie Bournonville (Tarantula)
- La civil de Teodora Ana Mihai, produit par Hans Everaert (Menuetto) et coproduit par Delphine Tomson, Jean-Pierre et Luc Dardenne (Les Films du Fleuve)
- Rookie de Lieven Van Baelen, produit par Eurydice Gysel, Koen Mortier (Czar Film) et coproduit par Jacques-Henri Bronckart (Versus Production)
- The Barefoot Emperor de Peter Brosens et Jessica Woodworth, produit par Peter Brosens et Jessica Woodworth (Bo Films) et coproduit par Marc-Henri Wajnberg (Wajnbrosse Productions)
MAGRITTE DU MEILLEUR SCÉNARIO ORIGINAL OU ADAPTATION
- Filles de joie : Anne Paulicevich
- Les Intranquilles : Joachim Lafosse, Juliette Goudot, Anne-Lise Morin, François Pirot, Lou du Pontavice, Chloé Léonil, Pablo Guarise
- Un monde : Laura Wandel
- Une vie démente : Raphaël Balboni, Ann Sirot
MAGRITTE DU MEILLEUR FILM ETRANGER EN COPRODUCTION
- Adam de Maryam Touzani, coproduit par Patrick Quinet (Artémis Productions)
- L’homme qui a vendu sa peau de Kaouther Ben Hania, coproduit par Annabella Nezri (Kwassa Films)
- Onoda, 10.000 nuits dans la jungle d’Arthur Harari, coproduit par Jean-Yves Roubin et
Cassandre Warnauts (Frakas Productions)
- Titane de Julia Ducournau, coproduit par Jean-Yves Roubin et Cassandre Warnauts (Frakas Productions)
MAGRITTE DE LA MEILLEURE ACTRICE
- Adam: Lubna Azabal (rôle : Abla)
- Adieu les cons : Virginie Efira (rôle : Suze Trappet)
- Une vie démente : Lucie Debay (rôle : Noémie)
- Une vie démente : Jo Deseure (rôle : Suzanne)
MAGRITTE DU MEILLEUR ACTEUR
- Cette musique ne joue pour personne : Bouli Lanners (rôle: Poussin)
- Slalom: Jérémie Renier (rôle : Fred)
- Serre moi fort: Arieh Worthalter (rôle : Marc, le père)
- Une vie démente : Jean le Peltier (rôle : Alex)
MAGRITTE DE LA MEILLEURE ACTRICE DANS UN SECOND RÔLE
- Fils de plouc : Claire Bodson (rôle : Cachemire)
- Les choses qu’on dit, les choses qu’on fait : Emilie Dequenne (rôle : Louise)
- Titane : Myriem Akheddiou (rôle : la mère d’Adrien)
- Un monde : Laura Verlinden (rôle : Agnès, l’institutrice)
MAGRITTE DU MEILLEUR ACTEUR DANS UN SECOND RÔLE
- Adoration : Benoît Poelvoorde (rôle : Hinkel)
- Jumbo: Sam Louwyck (rôle: Hubert)
- Les Intranquilles : Patrick Descamps (rôle : Patrick)
- Une vie démente : Gilles Remiche (rôle : Kevin)
MAGRITTE DU MEILLEUR ESPOIR FÉMININ
- Adoration : Fantine Harduin (rôle : Gloria)
- Benedetta : Daphné Patakia (rôle : Bartholomea)
- Illusions perdues : Salomé Dewaels (rôle : Coralie)
- Un monde : Maya Vanderbeque (rôle : Nora)
MAGRITTE DU MEILLEUR ESPOIR MASCULIN
- Des hommes : Yoann Zimmer (rôle : Bernard)
- Mandibules : Roméo Elvis (rôle : Serge)
- SpaceBoy: Basile Grunberger (rôle: Jim)
- Un monde : Günter Duret (rôle : Abel)
MAGRITTE DE LA MEILLEURE IMAGE
- Adoration : Manuel Dacosse
- Titane : Ruben Impens
- Un monde : Frédéric Noirhomme
MAGRITTE DU MEILLEUR SON
- Titane : Séverin Favriau, Fabrice Osinski, Stéphane Thiébaut
- Un monde : Mathieu Cox, Corinne Dubien, Thomas Grimm-Landsberg, David Vranken
- Une vie démente : Philippe Charbonnel, Julien Mizac, Bruno Schweisguth
MAGRITTE DES MEILLEURS DÉCORS
- Les Intranquilles : Anna Falguères
- Titane : Laurie Colson, Lise Péault
- Une vie démente : Lisa Etienne
MAGRITTE DES MEILLEURS COSTUMES
- Filles de joie : Ann Lauwerys
- Mon légionnaire : Catherine Cosme
- Une vie démente : Frédérick Denis
MAGRITTE DE LA MEILLEURE MUSIQUE ORIGINALE
- Adoration : Vincent Cahay
- Ma voix t’accompagnera : Loup Mormont
- Rookie : Daan
MAGRITTE DU MEILLEUR MONTAGE
- Les Intranquilles : Marie-Hélène Dozo
- Un monde : Nicolas Rumpl
- Une vie démente : Raphaël Balboni, Sophie Vercruysse
MAGRITTE DU MEILLEUR DOCUMENTAIRE
- #Salepute de Myriam Leroy et Florence Hainaut, produit par Annabella Nezri (Kwassa Films)
- Chasser les dragons d’Alexandra Kandy-Longuet, produit par Julie Frères (Dérives)
- Ma voix t’accompagnera de Bruno Tracq, produit par Benoit Roland (Wrong Men)
- Petit samedi de Paloma Sermon-Daï, produit par Sébastien Andres et Alice Lemaire (Michigan Films)
MAGRITTE DU MEILLEUR COURT MÉTRAGE DOCUMENTAIRE
- Belgium – 20 de Jean-Benoît Ugeux, produit par Jean-Benoît Ugeux (Apoptose)
- Juliette the great d’Alice Khol, produit par David Borgeaud et Erika Meda (Roue Libre
Production)
- Maîtresse de Linda Ibbari, produit par Julie Frères (Dérives)
- Mother’s d’Hippolyte Leibovici, produit par Laurent Gross (INSAS)
MAGRITTE DU MEILLEUR COURT MÉTRAGE DE FICTION
- L’enfant salamandre de Théo Degen, produit par Laurent Gross (INSAS) et Vincent Canart (Atelier de Réalisation de l’INSAS)
- Sprötch de Xavier Seron, produit par Guillaume Kerbusch et Laura Petrone (Angie Productions) et Julie Esparbes (Hélicotronc)
- T’es morte Hélène de Michiel Blanchart, produit par Michaël Goldberg (Daylight Films) et Boris Van Gils (Formosa Productions)
- Titan de Valéry Carnoy, produit par Julie Esparbes (Hélicotronc)
MAGRITTE DU MEILLEUR COURT MÉTRAGE D’ANIMATION
- Amours libres d’Emily Worms, produit par Vincent Gilot (Atelier de Production de La Cambre)
- Le quatuor à cornes : là-haut sur la montagne de Benjamin Botella et Arnaud Demuynck, produit par Arnaud Demuynck (La Boîte,… Productions)
- On est pas près d’être des super héros de Lia Bertels, produit par Thierry Zamparutti
(Ambiances asbl)
- Tête de linotte ! de Gaspar Chabaud, produit par Vincent Gilot (Atelier de Production de La
Cambre)