Une Histoire d’Amour d’Hélène Fillières avec Benoit Poelvoorde sort enfin en Belgique ce mercredi. On a failli attendre !
Tout le monde peut se tromper. Nous avions pronostiqué pour Une Histoire d’Amour une sortie tonitruante et un succès public à l’aune du rôle défendu par Benoit Poelvoorde.
Sorti en France le 9 janvier, le premier long métrage réalisé par Hélène Fillières a peiné à dépasser les 40.000 spectateurs. C’est tout simplement le plus mauvais score de l’histoire de Benoit dans un premier rôle en France. Totalement inattendu. Mais les crashs les plus sanglants le sont toujours
Tous ceux qui avaient lu le scénario avaient pourtant envisagé les plus grandes choses pour ce changement de cap, plongée en apnée au cœur de la gravité. Trop radical? C’est une possibilité. Le public n’était sans doute pas préparé à cela et la campagne promo à laquelle n’avait pas pris part l’acteur principal a peut-être plombé la carrière du film.
Toujours est-il qu’Une Histoire d’Amour ne sera heureusement pas classé au rayon des pertes et profits du cinéma francophone et qu’il arrive enfin chez nous ce 3 avril après une visite remarquée lors du Ramdam Festival tournaisien.
L’air de rien, la période est plus propice à une sortie de ce type de film. On approche du Festival de Cannes et beaucoup de distributeurs gardent leurs meilleurs cartouches « sérieuses » dans les tiroirs dans l’espoir qu’elles se voient proposer un petit tour sur la Croisette.
Du coup, Une Histoire d’Amour semble une alternative très crédible aux nombreuses comédies, films d’animation et blockbusters d’actions qui tiennent actuellement l’affiche dans les multiplexes.
Autre petit atout: après une année 2012 où il avait été omniprésent sur les écrans, Benoit Poelvoorde s’est fait subitement plus discret. On l’a certes aperçu ici et là sur des plateaux de tournage (et encore, il fallait avoir l’œil ouvert et les bons sésames), mais le spectateur, pour autant que faire se peut avec ce stakhanoviste invétéré, est presque sevré.
Comme chacun le sait à présent, Une Histoire d’Amour est librement inspiré de l’affaire du banquier Stern. Pour dribbler toute connexion avec le monde réel et de sulfureux procès, Hélène Fillières qui a écrit le scénario évite tous les noms de famille. Chaque personnage y est désigné par sa fonction et sa place dans le drame ou dans la société. Comme dans le roman de Régis Jauffret qui a inspiré cette adaptation
La jeune femme vit donc avec son vieux mari (qui ne l’est d’ailleurs pas vraiment) et monnaie plus ou moins ses charmes. Jusqu’au moment où on la présente au Banquier, charismatique, froid, riche, qui a tellement de pouvoir qu’il ne conçoit sa sexualité que dans l’humiliation. Une relation complexe va se mettre en place entre un homme qui ne parvient jamais vraiment à se laisser dominer même s’il y aspire et une femme qui n’a pas la force et l’énergie de jouer constamment son rôle de maîtresse. Qui humilie qui? Et jusqu’où?
« Alors que le meurtre passionnel est vieux comme le monde, l’histoire de ces deux amants, avec sa problématique du dominant/dominé, fascine parce qu’elle bouscule la moralité sage et docile et embarrasse les frustrés. », explique Hélène Fillières sa réalisatrice. » Parce qu’elle nous emmène au-delà de nos limites, nous aide à comprendre les chemins obscurs de nos désirs, nous entraîne dans nos zones d’ombres, et puis, pose une question fondamentale : qu’est-ce que l’amour ? Comment aime-t-on ? Pourquoi aime-t-on ? Quels fantasmes intimes et inaccessibles déclenchent la jouissance de l’autre ? Pour moi, la vraie question que pose cette histoire, c’est le poids des préjugés et de l’opinion publique sur ces pratiques amoureuses jugées “inclassables”. Elles dérangent avant tout parce qu’elles n’appartiennent qu’à ceux qui les vivent et j’ai voulu rendre hommage à leurs deux protagonistes. J’ai voulu saluer leur irrévérence.
Que s’est-il donc passé pour qu’on en arrive à cette image dramatique : un homme retrouvé mort en combinaison latex, tué par sa maîtresse ? »
[Toutes les photos par Fabrizio Maltese]
Visiblement mal compris par beaucoup, Une Histoire d’Amour nous arrivera donc ce mercredi. Philippe Bourgueil qui l’a monté nous expliquait récemment combien il avait trouvé son ami Benoit Poelvoorde exceptionnel dans ce rôle atypique, grave et tendu. De l’avis de tous, Laetitia Casta est également captivante dans ce rôle torride.
Deux excellentes raisons d’aller juger sur pièces en faisant abstraction des réactions françaises. Une Histoire d’Amour est clairement le genre de film qui pourrait être totalement réhabilité dans un futur proche. Et vous serez les premiers à ne pas vous en mordre les doigts