Tous les dix ans, le magazine anglais de référence Sight and Sound organise un sondage pour élire les meilleurs films de tous les temps. Surprise (ou pas!), c’est le film de la regrettée cinéaste belge, Chantal Akerman, Jeanne Dielman, 23 quai du Commerce, 1080 Bruxelles qui prend la tête de ce prestigieux classement.
En 70 ans de sondage, c’est la première fois qu’une réalisatrice prend la tête du classement, première fois pour un film belge également. Lors du précédent classement il y a 10 ans, le film était classé 36e.
Notons qu’en février 2019, le magazine américain Indiewire avait déjà classé le film en tête des meilleurs films réalisés par des femmes. Quelques mois plus tôt, le film figurait à la 14e place du classement de la BBC « Les 100 meilleurs films en langue étrangère de tous les temps ». Il occupe la même place dans le classement des 100 meilleurs films français de tous les temps des Inrockuptibles, à la 19e place des 100 meilleurs films de tous les temps du Village Voice, dans le classement « Europe in 25 films » du Guardian...
C’est dire que le cinéma de Chantal Akerman vieillit comme un bon vin, gagnant en densité et pertinence alors que nos sociétés évoluent, et qu’il continue à offrir un regard acéré et visionnaire sur les enjeux qui les traversent.
Chantal Akerman est aujourd’hui au coeur de l’actualité. Alors qu’une retrospective de grande ampleur planifiée pour 2024 est en cours de conception, Bozar présente actuellement une installation rarement montrée de la cinéaste. Selfportrait/Autobiography: A Work In Progress (1998) se décline de façon spectaculaire à travers 6 à 8 moniteurs et contient des images de plusieurs de ses films qui ont marqué et jalonné sa carrière : Hôtel Monterey (1972), Jeanne Dielman, 23 quai du commerce à 1080 Bruxelles (1975), Toute une nuit (1982) et D’Est (1993). Des plans simples et rigoureusement choisis où des personnages s’attèlent à des tâches de la vie quotidienne ou sont figés dans l’attente, à l’image des files interminables immobilisées dans les rues de Moscou enneigées. La voix hors-champ de l’artiste constitue le fil conducteur de l’installation, restituant à travers la lecture de son livre Une famille à Bruxelles le parcours intime de l’une des plus grandes réalisatrices belges du XXe siècle.
Il y a quelques semaines d’ailleurs était montrée une version restaurée de son film Toute une nuit (nous vous en parlions ici), ode à sa ville de sang et de coeur, Bruxelles.