Je suis supporter du Standard
Overdose de foot

Football et cinéma ont pendant longtemps fait chambre à part, mais il semble que le cinéma belge ait décidé qu’en 2012, les choses allaient radicalement changer: un des personnages principaux de Le Monde nous appartient de Stephan Streker est un jeune footballeur, Benoit Poelvoorde incarnera pour Benoit Mariage un agent de joueurs spécialisés dans les footballeurs ivoiriens et Riton Liebman qui peaufine actuellement son premier film en tant que metteur en scène y interprète un… supporter du standard. Aux côtés de Léa Drucker et Jackie Berroyer. Cela dit, aucun de ces trois films n’est à proprement parler pas un film sur le foot. Pour  cela, il faudra attendre le Match Over de Bernard Bellefroid avec David Murgia (encore) qui promet beaucoup.

 

 

Pour Milou (Riton Liebman), le football est une véritable drogue, une religion qu’il pratique en fanatique, se faisant un devoir de contribuer personnellement, et par tous les moyens, à la victoire de son club : le Standard de Liège. Quand il n’est pas en mission avec son fidèle disciple Looping (David Murgia, attendez-vous à le voir bientôt partout) pour perturber le sommeil des joueurs d’une équipe adverse, Milou commente les dernières informations footballistiques au café de M.Raymond son vieil ami et mentor. Il transforme même à la sauce football les questions du code de la route qu’il enseigne à l’auto-école « Jacky team ».

 

Cet amour du ballon rond est la seule source de satisfaction dans la vie de Milou, et ce malgré les résultats calamiteux de ses favoris. L’arrivée à l’auto-école d’une nouvelle élève séduisante, Martine (Léa Drucker), une animatrice radio va pousser Milou à tempérer ses ardeurs de supporter. Car Martine déteste le foot.

Renonçant au match de l’année pour passer une soirée avec Martine, Milou semble sur le point d’aborder un tournant de son existence. C’est sans compter la force dévastatrice de la dépendance, qui va faire échouer ses efforts. Il atterrit finalement par hasard dans une réunion des Alcooliques Anonymes. D’abord convaincu de ne pas avoir sa place parmi ces toxicomanes, Milou finit par se rendre à l’évidence que son addiction au football est un handicap aussi grand pour sa vie sociale que l’alcoolisme en question. Il accepte l’aide d’un des membres, Lakdar, qui lui propose d’être son parrain.

 

Et il devient supporter d’Anderlecht. Ou pas.

 

 

« Depuis quelques années, l’addiction est considérée comme une véritable maladie qu’il faut soigner. », explique Riton Liebman qui se lance ici dans une des entreprises les plus importantes de sa vie. « Des services spécialisés sont créés dans les hôpitaux, des livres sont écrits sur le sujet, des spécialistes en parlent à la télévision… Elle semble être le mal de notre société, où la frustration nous conduit à des comportements de « surconsommation ». Car qu’est-ce que l’addiction sinon le fait d’abuser d’un produit ? Que ce soit la nourriture, la cigarette, l’alcool, le cannabis, le sexe, les jeux vidéo, la télévision, le téléphone portable, les médicaments, l’héroïne etc. ? L’addiction, c’est la substitution d’un produit à une angoisse. Évidemment, il en existe différentes sortes : difficile de comparer un accro au chocolat et un alcoolique… Impossible même ? Et pourtant le phénomène est identique. »

 

Projet étonnant, presque atypique, Je suis supporter du Standard est produit en Belgique par La Parti, une institution à qui on doit quelques films définitivement en marge du système qui constituent aujourd’hui des éléments importants de l’épine dorsale du 7e art belge.

 

 

 » À l’étranger, le cinéma belge est souvent perçu comme drôle, garant d’une certaine dérision, gentiment délirant, décalé… », explique Philippe Kauffmann. « « Pays du surréalisme » résume-t-on souvent. Et pourtant quand je vois la grande majorité des films produits ici, je retrouve finalement peu cette image de folie douce véhiculée ailleurs. Depuis Calvaire et Aaltra et leur humour très noir, La Parti Production n’a plus développé en fiction de comédie et cela nous manque ! Il y a bien sûr eu la belle aventure Panique au village, mais là nous étions dans l’animation. Qaund Riton Liebman nous a envoyé Je suis supporter du Standard, il tombait à pic. Le scénario est drôle, mais le drame humain qui le sous-tend est très touchant. »

 

« C’est aussi que nous connaissons Riton depuis longtemps, » surenchérit le producteur. « Parti tenter sa chance à Paris en même temps que Lucas Belvaux, ils ont commencé à jouer ensemble dans « Allons z’enfants » de Yves Boisset. Depuis, Riton n’a pas arrêté de jouer au cinéma, au théâtre, de se mettre en scène dans des One Man Show très drôles et très personnels avant de goûter à la mise en scène à travers 3 courts métrages. »

 

Car oui, l’acteur est aussi, depuis longtemps, un metteur en scène qui aspire au format long et développe une vision aiguisée de son art. Dans sa tête, son film est déjà clair, déterminant un style, une façon de mener son entreprise, de poser sa caméra et de suivre les acteurs.  Il s’est remarquablement entouré aussi avec un assistant réalisateur de luxe Guillaume Malandrin (photo en vert) et un chef op expérimenté, Frédéric Noirhomme (sur les photos, derrière la caméra). Notamment.

 

 » J’ai  voulu me concentrer et donner toute mon attention aux acteurs », explique Riton. « Nous sommes dans une comédie et pourtant il me semble que les ressorts comiques devront avant tout s’appuyer sur la sincérité de la scène. L’objectif est d’obtenir un niveau de jeu juste et réaliste, intense et pourtant légèrement exagéré. Les acteurs ne devront jamais se soucier de l’aspect technique du plateau de tournage. La caméra est à leur merci, à leur disposition. Elle se livrera à une chorégraphie harmonieuse et complémentaire à la leur, et essaiera de saisir une réalité qui manque toujours de lui échapper.

 

 

L’enthousiasme du réalisateur trouve un écho chez ses producteurs. L’association semble appelée à briller : « Je suis supporter du Standard est le premier long métrage d’un vrai auteur. Ses courts métrages le montrent, Riton Liebman a un ton, un humour très personnel, mélange d’autodérision, d’introspection sensible. Ce premier film sera réalisé simplement, à hauteur d’homme. L’essentiel étant  à travers le rire et la comédie d’amener le spectateur à ce petit « supplément d’âme » bouleversant. Osons le dire : peut-être tenons-nous là notre Woody Allen belge ? »

 

Carrément?

 

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