Après La Chouette entre veille et sommeil dont nous vous avions parlé ici, la Chouette du cinéma imaginée par Arnaud Demuynck est de retour avec cette fois-ci une sélection de courts métrages d’animation inspirés par l’intemporel format de la fable, largement popularisé par Jean de la Fontaine.
Une fable est une histoire imaginaire, souvent en vers, dont le but est d’illustrer une morale. Héritée de l’Antiquité, la fable a souvent pour héros des animaux, chargés alors de représenter les hommes. Ainsi Le Lièvre et la Tortue, Le Loup et l’Agneau, ou encore Le Corbeau et le Renard – dont on trouve ici une relecture – sont autant de récits identifiés dès le IVème siècle avant Jesus Christ parmi les Fables d’Esope. Tout ça ne nous rajeunit certes pas, mais surtout, nous rappelle comme les récits traditionnels, contes ou fables, structurent notre imaginaire, et sont à l’origine de notre façon de raconter des histoires, et d’appréhender le monde.
C’est donc sur base de ce terreau extrêmement fertile que se déclinent les 6 courts récits qui composent La Fontaine fait son cinéma, entre humour (beaucoup) et poésie (un peu).
Ainsi, Pascal Adant choisit l’axe des coulisses du cinéma pour relire La Fontaine. Il revisite Le Corbeau et le Renard façon plateau de tournage. La voix off lit les premiers vers que tout le monde connait: « Maître Corbeau sur un arbre perché tenait en son bec… » Mais quoi? L’accessoiriste semble avoir oublié le principal… le fromage! S’en suivent moult péripéties idoines inhérentes à un tournage: oubli du texte, rupture de la continuité, soucis logistiques… Une façon amusante de parler du cinéma aux plus petits, et de redécouvrir un texte iconique pour les plus grands.
Dans La Fontaine fait son documentaire: La Grenouille qui veut se faire aussi grosse que le boeuf, le réalisateur s’intéresse cette fois-ci au format documentaire, et livre un portrait décalé du petit batracien, nous en dévoilant un peu plus sur son régime alimentaire, ses amours, ses diverses us et coutumes, pour finir par expliquer le pourquoi du comment de la chute de la fable. Là aussi, l’approche est vive, humoristique et décomplexée.
Rumeurs de Frits Standaerts se penche sur la fuite en avant de trois petits lièvres brusquement tirés de leur sieste par un drôle de bruit. Leur affolement s’avère contagieux, et la rumeur se répand comme une trainée de poudre, terrorisant tous les animaux de la jungle, jusqu’à ce que le lion s’explique…
Rumeurs s’inspire d’une ancienne fable tibétaine qui marie dans son récit sagesse et humour. Le film décline dans un style très cartoonesque une histoire simple et universelle sur la tyrannie de la peur, et l’esprit grégaire qui s’empare de toute société, souvent pour le pire.
Dans un esprit là aussi très cartoonesque, Les Fables en délire : la poule, l’éléphant et le serpent de Fabrice Luang-Vija mélange des animaux issus de trois univers très différents, la ferme, la jungle et le désert. Il s’agit du treizième épisode d’une série initiée en 2001 où des animaux d’univers différents (ferme, forêt, jungle ou désert) se confrontent, se poursuivent et règlent allègrement leurs comptes. Fabrice Luang-Vija se permet les délires les plus enfantins, les plus inattendus et souvent les plus rocambolesques.
Restent deux courts films, tous deux réalisés par Pascale Hecquet, La Loi du plus fort et Le Pingouin. La réalisatrice était déjà au générique de l’opus précédent de La Chouette du cinéma (avec La Galette court toujours), elle revient ici avec deux interprétations ludiques et toutes en poésie. On s’éloigne de l’esthétique cartoon, pour retrouver une esthétique plus crayonnée et texturée, d’une grande tendresse et d’une grande douceur, mais qui n’occulte pas pour autant l’humour indissociable des fables, ni leur fantaisie, notamment celle de livrer dans le dernier film, Le Pingouin, une comédie musicale express. “Chez moi il fait froid et j’ai les pieds gelés, y’a pas de soleil et je ne peux pas bronzer”, le pingouin rêve d’aller voir si ailleurs l’herbe est plus verte. On se doute bien de l’issue de cette charmante ritournelle.
La Fontaine fait son cinéma sort de mercredi 29 mars, à la veille des vacances scolaires. Sa longueur, et la dynamique de la proposition conviennent parfaitement aux plus jeunes cinéphiles, dès 3 ans. N’hésitez pas à les emmener au ciné! Le film sera visible à Bruxelles, Charleroi, Liège, Mons et Namur.