Disparition de Richard Olivier

Richard Olivier - par Jean-Michel Vlaeminckx/ Cinergie

On vient d’apprendre la disparition du cinéaste belge Richard Olivier, auteur d’une cinquantaine de films, documentaires, courts et moyens métrages de fiction, ainsi que de nombreux épisodes de Strip-tease. Il est également le maître d’œuvre du projet Big Memory, sorte d’encyclopédie filmée du cinéma belge, collection d’entretiens avec des réalisateurs et réalisatrices belges, qui a également fait l’objet d’un livre. 

Richard Olivier est un cinéaste belge. Farouchement indépendant, il a réalisé plusieurs courts et moyens métrages de fiction, dont Marchienne de vie, Au fond Dutroux, Peaux de chagrin, Esther Forever, La Chanson rebelle, Remember Marvin Gaye, Les Allumés de la Foi, ainsi que de nombreux sujets pour la célèbre émission Strip-tease, dont le tout dernier, intitulé Le der des ders.

En tant qu’auteur, il a participé à plusieurs ouvrages collectifs dont Belgique, toujours grande et belle (Complexe) et À chacun son cinéma (Luc Pire). Il a également réalisé, avec la participation de 63 auteurs, un livre-album intitulé À la recherche du Cinéma perdu, édité à l’occasion du Centenaire de la naissance du Cinéma.

Big Memory, son projet tentaculaire, pharaonique, se voulait exhaustif, et donc forcément inachevé, un work-in-progress permanent, un film sans fin… Il rassemble aujourd’hui 170 entretiens de 13 minutes avec autant de cinéastes belges.

Sa devise était: « Tourner pour ne pas mal tourner. » « Le monde du cinéma, je n’en raffole guère, écrivait-il. Son fric, son boucan, ses vedettes affichées, ses cocktails arrosés, ses smokings clonés, son marketing triomphant, sa presse pressée, ses Césars oscarisés, ses fictions usagées m’amusent quelquefois mais me dépriment plutôt. Seul m’intéresse vraiment le cinéma qui s’essaye à filmer la vérité et que l’on nomme cinéma du réel, faute d’avoir trouvé mieux, histoire de faire court. »

 

Quelques oeuvres marquantes…

  • Marvin Gaye Transit Ostende, documentaire, 1989

Marvin, le géant de la soul music a jeté l’ancre à Ostende. Le choix de cette halte est pour le moins inattendu, voire incroyable. Document musical sur un artiste génial en proie au mal de vivre, disparu en 1984.

  • Marchienne de vie, documentaire, 1993

Marchienne de vie, bout du monde où la folie et l’absurdité se côtoient au quotidien dans un lieu appelé Marchienne-au Pont, jadis principal centre de la batellerie, on y fabriquait le meilleur acier du monde, les hommes y soufflaient le verre tandis que d’autres accourus des pays du soleil descendaient dans les mines. C’est là que s’inscrivait encore il n’y a pas longtemps l’Histoire de la Wallonie.

Ce film-quête a été tourné dans un pays en mal de vivre qui pourrait bien être rebaptisé  » le trou du cul du monde  » et que l’affaire Marc Dutroux allait mettre sous les feux de l’actualité deux ans plus tard.

  • Au fond Dutroux, documentaire, 1996

Ce document est à la fois une balade et une enquête dans le pays de Charleroi devenu le pays du crime, le pays de Marc Dutroux. Cette région minière économiquement en déclin depuis plus d’une vingtaine d’années, l’est aussi socialement et plus particulièrement encore culturellement, mais sur ce dernier point les politiques et les habituels interlocuteurs sociaux restent plus muets que des carpes. Ces silences assourdissants, ces silences plombés, nous avons tenté de les interrompre, de les déranger en nous mettant en chasse des traces laissées par Dutroux – l’homme taupe dont le monde entier a appris les agissements. Les ‘trous’ creusés par lui dans la terre et dans les coeurs et les âmes des hommes de ce pays se doivent de rester ouverts. C’est là le prix à payer si l’on en souhaite la guérison.

  • Remember Marvin Gaye, documentaire, 2002

En 1981, Marvin Gaye, le géant de la soul music, jeta l’ancre à Ostende, ville de bord de mer en Belgique. Le choix de cette halte était pour le moins inattendu, voire incroyable. Apparemment, rien ne devait amener ce personnage charismatique à vivre dans la ville de James Ensor, célèbre peintre impressionniste, chantre de la folie des hommes. Cependant, Marvin séjourna à Ostende durant deux ans avant de repartir pour les States où il obtint un Grammy Award avec son dernier album « Sexual Healing ». Il mourut le 1er avril 1984, tué par son père pasteur de plusieurs balles de revolver.

Vingt ans après le tournage d’un premier film intitulé « Marvin Gaye Transit Ostend » d’une durée de 29 minutes, Richard Olivier a voulu prolonger celui-ci en partant du texte de la photo que Marvin lui dédicaça :« A Richard, du fond du coeur je te remercie d’avoir révélé mon âme d’artiste, mais avant tout, ami artiste, je te remercie de m’avoir rendu immortel »

Grâce à de nouvelles séquences tournées en 2002 et à des images inédites du chanteur américain à Ostende, « Remember Marvin Gaye », est un témoignage bouleversant et exceptionnel sur la personnalité de ce génial représentant de la musique Rythm and Blues, mort tragiquement à l’âge de 44 ans.

  • Esther Forever, documentaire, 2007

Esther est une septuagénaire incassable et inclassable : indépendante mais ayant longtemps vécu sous la coupe de sa mère, jamais mariée mais souvent amoureuse, parfois dépressive mais furieusement ancrée dans la vie, mysanthrope plus attachée à ses animaux (qu’elle fait empailler) qu’au genre humain mais qui raconte sa vie, exprime ses opinions et confie ses regrets et ses espoirs avec une gouaille franco-flamande irrésistible. Durant sept ans, Richard Olivier a filmé cette vieille dame indigne, tour à tour complice et récalcitrante, pour en faire un portait lucide et respectueux, celui d’une véritable héroïne de la condition humaine.

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