De Rouille et d’os
La presse salue les tripes et le cœur

Vous avez pu lire ici tout le bien que nous pensons de De Rouille et d’Os, un film de Jacques Audiard qui risque de marquer au fer rouge tous ceux qui vont s’y plonger. Notre avis pourrait détonner au cœur d’un accueil tiède, mais ce n’est pas le cas. Jusqu’ici, les critiques belges et françaises sont dithyrambiques et chacun met en exergue la prestation époustouflante de Matthias Schoenaerts, destiné à devenir une star internationale en moins de temps qu’il n’en faut pour orthographier correctement son nom.

(notre critique, rédigée « in tempore non suspecto » est à lire ici)

 

« Seules quelques précieuses ridicules ne voient pas en Jacques Audiard un des grands cinéastes d’aujourd’hui. Qui, de film en film, gagne à lui des spectateurs toujours plus nombreux, » écrit Éric Libiot dans L’Express avant d’enchaîner à la première personne :  » Je fais le pari que De rouille et d’os franchira une marche supplémentaire. Et dans cet heureux événement, il y a d’heureuses raisons. D’abord, le refus des concessions de la part d’un artiste qui sait différencier populisme et populaire et, partant, considère l’exigence comme moteur d’un cinéma susceptible de jouer les rassembleurs. Le public n’est ni veau ni vache. Cette vision très peu oeucuculménique me ravit. Il y a ensuite quelque chose de touchant à voir un cinéaste, gaillard de 60 ans à la carrière multiprimée, remettre l’ouvrage sur le métier et lâcher les vannes de l’émotion. Plus exactement, changer de braquet pour ne pas fabriquer uniquement de l’émotion en intellectualisant le récit (Regarde les hommes tomber, De battre de mon coeur s’est arrêté), mais en fouillant ouvertement dans le viscéral et la pulsion. Audiard pleure, sourit, et moi avec. Du mélo revisité, assumé, sublimé. »

 

 

 

« En adaptant le recueil de nouvelles de l’écrivain canadien Craig Davidson «Un goût de rouille et d’os», Jacques Audiard s’attaque au double thème du handicap physique et social en y ajoutant un souffle positif qui illumine la noirceur du propos », explique un André Rivier plus pédagogique dans le Télégramme. « L’ensemble étant servi par une mise en scène d’une rigueur exemplaire. Comme à son habitude, l’auteur de «Regarde les hommes tomber» a choisi des interprètes surprenants: Marion Cotillard qui n’hésite pas à casser son image de vedette glamour, et Matthias Schoenaerts, un acteur belge découvert en février dernier dans le bestial «Bullhead»

 

Comme à son excellente habitude, Louis Danvers dans le Focus Vif dissèque le film avec délectation, lui octroyant carrément quatre étoiles : « Préférant à toute structure narrative serrée le ton de la chronique, où ce sont les personnages qui font progresser le récit, Jacques Audiard signe un film d’une singulière profondeur humaine. Exigeant avec ses comédiens, il pousse Marion Cotillard dans ses derniers retranchements, obtenant d’une interprète trop souvent minaudière une prestation sublime d’émotion retenue. Matthias Schoenaerts est la révélation du film, comme il l’était déjà de Rundskop. Le jeune acteur anversois offre au personnage la masse et l’épaisseur qu’il exige, sa force physique mais aussi ses fragilités intérieures. Une incarnation, au sens le plus fort d’un terme signalant l’extrême « physicalité » d’un film âpre et prenant, aux images vibrantes et organiques, au grain réaliste et poétique pourtant. »

 

“Une ombre de « Strada », un reflet de « Fight Club », une pincée de frères Dardenne, le tout shaké par l’énergie cinématographique d’Audiard, et vous aurez une petite idée de ce cocktail de « rouille et d’os », et de talents”, synthétise fort justement Alain Spira dans Paris Match. “À l’instar de celui dont déborde le Belge ­Matthias ­Schoenaerts – révélé dans « Bull Head » –, impressionnant dans ce rôle de colosse au cœur d’argile, mais handicapé des sentiments.

 

 

Même chanson dans les Inrocks sous la plume (brillante et avisée) de Serge Kaganski : ‘Matthias Schoenaerts et Marion Cotillard sont immenses. Déjà impressionnant dans Bullhead de Michael R. Roskam, sorti en février dernier, le balèze flamand va devenir à coup sûr une star, alliant la présence physique, le visage bien dessiné, l’accent peu usité et un naturel désarmant dans toutes les situations. … Dans De rouille et d’os, elle (Marion Cotillard) est tout bonnement excellente. C’est le cas de tous les seconds rôles : Bouli Lanners, Céline Sallette, Corinne Masiero ou le petit Armand Verdure existent pleinement à côté du couple central.

 

Une constatation que ne cherche pas à contester Éric Libiot encore, dans un autre article paru lui aussi dans l’Express : ‘Marion Cotillard est magnifique, Matthias Schoenaerts intense, l’intrigue charrie un romanesque à la fois doux et rugueux, le récit fait écho à cette époque où chacun avance comme il peut, la mise en scène élève le débat, éclairant un chemin qui lui est singulier, entre classicisme et fulgurances. Bref, c’est à voir. Toutes affaires cessantes. Évidemment. Sinon, je ne vous parle plus.

 

 

‘On sait ce qu’il advient aux acteurs qui passent chez Audiard », prévient Fernand Denis dans La Libre. ‘Emmanuelle Devos, Romain Duris, Tahar Rahim vous le diront : Audiard, ça rime avec César. Quasi inconnu en France et dans le reste du monde – « Bullhead » (Rundskop – Tête de bœuf) est son seul film distribué à l’étranger – la performance de Matthias Schoenaerts dans ‘De rouille et d’os’ aux cotés de Marion Cotillard n’en sera que plus percutante.

 

Le ton est tout aussi empathique, mais la vision plus féminine dans Le Soir sous la plume de Fabienne Bradfer : ‘C’est plutôt le genre qui donne envie de poser sa tête sur ses épaules larges. Sûr, avec son look mi-ange mi-bad boy un rien timide, l’animal a de quoi affoler, intriguer, fasciner et séduire. Marion Cotillard, sa partenaire dans De rouille et d’os, de Jacques Audiard, l’a présenté à Michael Mann qui a été soufflé par son magnétisme et parle de « révélation ».

À 34 ans, cet acteur flamand qui aime le foot, la boxe, la photo et la peinture murale est courtisé par Hollywood et le cinéma français depuis qu’ils l’ont découvert tout en muscles dans le film de Michaël R. Roskam. À l’aube de bien des choses sans aucun doute, il a pourtant déjà une vingtaine d’années de métier derrière lui. Fils du célèbre comédien Julien Schoenaerts, il monte sur les planches aux côtés de son père dès l’âge de huit ans. À partir de là, difficile pour lui de dire si « comédien » est une envie. Il n’a jamais formulé l’idée. Il préfère parler de nature. Et fonctionner à l’instinct. Il aurait pu devenir footballeur professionnel, mais, trop têtu pour se laisser mener, il a changé de cap sans regret par envie d’absolu’

 

Dans la critique du film parue ce matin, elle confirme : « Matthias Schoenaerts montant sur scène pour recevoir le prix d’interprétation à Cannes ? Il a un gros potentiel. A ce stade -on est au début de la compétition-, on lui donne sans hésitation. Et ce n’est pas du chauvinisme de base. Matthias Schoenaerts est d’une intensité absolue dans le film d’Audiard. Mec paumé tout en muscles, il va cheminer de la castagne aux larmes, du rapport physique à l’amour, de la violence à l’émotion. C’est lui qui nous amène à Marion Cotillard (bouleversante) et ses moignons (sensuels trash). C’est lui qui ramène la princesse à la vie. Et qui passe du stade grand frère à celui de père en se bousillant les mains sur un lac gelé. »

 

 

Moustique y va aussi de son couplet laudatif sur la prestation de l’acteur belge : « Après avoir été boeuf aux hormones dans Rundskop, le voici orque mutique chez Audiard. Acteur massif, Schoenaerts torpille en sous-marin face à Cotillard en sirène de marineland. Ce qui est beau, c’est qu’Audiard reste toujours du côté du cinéma, pas de la leçon de morale. Prophète silencieux de la misère sociale, il boxe quelque part entre The Wrestler d’Aronofskyet les films des frères Dardenne. L’érotisme en plus. »

 

Des comédiens qui illuminent un film transcendé par une réalisation épidermique ça donne…  Un très grand moment de cinéma. C’est aussi la conclusion de Thierry Chèze dans Studio qui rejoint notre propre approche du film. La boucle est bouclée : « Grâce à eux (les acteurs) et ce qui les entoure, Audiard fait rimer poésie et réalisme, larmes et fous rires, cris et silence. Porté par la maestria de sa mise en scène, De rouille et d’os redonne au mot émotion souvent galvaudé toutes ses lettres de noblesse. Jusqu’ici, les films d’Audiard impressionnaient. Pour la première fois, l’un d’eux nous touche. Profondément. Puissamment. Ineffaçable. ’

 

 

Les plus boulimiques trouveront une autre revue de presse tout aussi enthousiaste sur le site de Wallimage

 

 

 

 

 

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