Daphné Patakia: « J’adore quand Verhoeven injecte de l’humour dans les scènes d’amour »

Rencontre avec la comédienne belgo-grecque Daphné Patakia, à l’affiche ce mercredi du film évènement de Paul Verhoeven Benedetta, qu’elle présentait la semaine dernière au BRIFF.

Née à Bruxelles de parents grecs, la jeune comédienne s’adonne dès sa plus tendre enfance aux joies du théâtre, en compagnie de ses parents et de leurs amis de la communauté grecque de Bruxelles, répétant tous les dimanches pour monter des spectacles chaque fin d’année. Elle s’épanouit tellement sur scène qu’elle décide d’en faire son métier, et intègre après ses études secondaires le Conservatoire National d’Athènes. Elle fait un peu de théâtre là-bas, puis s’installe à Paris où sa carrière démarre très vite avec Djam de Tony Gatlif, projeté à Cannes. On la verra ensuite dans des films grecs comme français (notamment un court métrage de Yórgos Lánthimos, l’incroyable réalisateur de The Lobster ou The Favorite), avant de la retrouver dans des séries à succès comme Versailles ou Ovni(s).

On la retrouve d’ailleurs à la sortie du plateau de la saison 2 d’Ovni(s), tourné en partie à Bruxelles, enchaînant directement sur la présentation du film de Verhoeven, avant-première très attendue dans le cadre du BRIFF. Et on retiendra malgré l’agitation et le brouhaha général que Daphné Patakia imite très bien Paul Verhoeven…

Pouvez-vous nous présenter en quelques mots Benedetta, le film de Paul Verhoeven?

En une phrase, c’est l’histoire de deux nonnes lesbiennes au XVIIe siècle. Mais bon, c’est un peu réducteur, il y a de très nombreux thèmes abordés dans le film. A chaque fois que je vois le film, je le vois sous un autre prisme, il est extrêmement riche.

Comme souvent chez Paul Verhoeven, le film met en scène des personnages de femmes extrêmement affirmées, pouvez-vous nous présenter le vôtre, Bartholomea?

Bartholomea est une jeune fille qui débarque sans crier gare dans un couvent, où elle va tout chambouler. Elle réveille chez Benedetta ses désirs et bien d’autres choses encore. C’est un déclencheur en fait.

Quand j’ai lu le livre sur lequel s’est basé Paul Verhoeven pour écrire le scénario, Soeur Benedetta entre sainte et lesbienne, j’ai été frappé par la description que l’autrice Judith C. Brown fait du couvent comme un lieu de résistance, de révolution féminine, de révolte. Les femmes allaient souvent au couvent pour échapper à la société de l’époque, extrêmement patriarcale. Elle pouvait y apprendre à lire, à écrire, choses qu’elles ne pouvaient pas forcément faire en dehors.

Mon personnage effectivement fuit son père, ses frères, et va s’épanouir dans ce contexte.

Et puis dans les films de Paul, les personnages féminins sont toujours très complexes, ils sont assez sombres, leur morale et leurs intentions sont souvent troubles. Ici, ce qu’elles veulent, c’est le pouvoir, et elles font tout faire pour l’avoir.

Comment avez-vous réagi quand vous avez appris que vous feriez le film?

J’étais très contente quand Paul m’a annoncé que l’on allait travailler ensemble. J’avais vu quelques-uns de ses films, je les ai tous rattrapés depuis, et j’étais fan. J’avais lu le scénario, que j’avais trouvé incroyable. A chaque page, je me disais: « Mais c’est dingue, il n’y a aucune scène normale dans ce film! » Même les scènes qui pourraient juste « meubler » pour faire avancer l’histoire, il y a toujours un twist qui vient déstabiliser le spectateur. On est tout le temps aux aguets.

J’étais vraiment très contente de faire partie de son univers, de voir comment il travaillait sur le plateau, de travailler aussi avec Virginie Efira, et Charlotte Rampling, Lambert Wilson, bien sûr.

Très stressée aussi! Je me souviens que j’avais vu la conférence de presse du film Elle, où les acteurs expliquaient que Paul dit très peu de choses sur le plateau, qu’il ne se focalise pas sur la psychologie des personnages. Isabelle Huppert précisait que les clés de ce qu’il veut sont dans sa mise en scène. Sur le plateau il était presque muet, et les rares fois où il me donnait une indication très concrète, genre « Tu dis ça parce que tu l’aimes », il partait, et se retournait en disant: « Ou peut-être pas! » C’était vraiment un exercice très intéressant de se laisser aller comme ça.

On se sent très responsabilisé. D’ailleurs, je l’ai entendu un jour dire à quelqu’un : « Le tournage est un processus démocratique ». Et c’est vrai qu’il demande sincèrement l’avis de tout le monde sur le plateau.

Benedetta-Daphne-Patakia

Qu’est-ce qui vous surprend le plus dans le film en tant que spectatrice?

En fait j’ai trouvé le film très drôle. Je ne sais pas si parce que je suis très concernée, et que je manque de distance, mais je trouve que les scènes d’amour ont beaucoup d’humour, ont souvent un côté décalé. Comme dans la vie d’ailleurs, le sexe ça peut être très drôle aussi. J’adore la façon dont dans son cinéma, Paul réussit à décaler les scènes, à raconter plusieurs choses en même temps. Je me souviens que quand j’ai découvert Basic Instinct, je trouvais la scène d’amour au coeur du film à la fois excitante bien sûr, et très érotique, mais aussi terriblement stressante, à cause de la tension dramatique.

Quels sont vos projets?

Je suis actuellement en train de tourner la 2e saison d’Ovni(s), avec Melvil Poupaud notamment. J’ai aussi tourné il y a quelques semaines dans Les Cinq Diables, un film de Léa Mysius avec Adèle Exarchopoulos, une expérience incroyable, c’était très inspirant de voir travailler Adèle, qui est très généreuse aussi bien en tant qu’actrice qu’en tant que personne. Et j’adore le cinéma de Léa Mysius, j’avais adoré son film précédent, Ava. C’est un rôle secondaire, mais j’ai hâte de découvrir le film.

 

 

 

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