Cinéma belge, flashback 2024: 1ère partie

Comme chaque année, jetons ensemble un coup d’oeil dans le rétroviseur, et penchons-nous sur l’année écoulée pour le cinéma belge, entre succès publics et critiques!

JANVIER

L’année commence fort avec la sortie de Un silence de Joachim Lafosse, un récit qui compte sur le rôle des proches dans les histoires de violences sexuelles et abus sur mineurs. Le film explore en profondeur les mécanismes de silenciation qui entourent les situations de violences sexuelles, notamment au sein des familles. Le cinéaste nous en parlait ici. Dans le rôle principal, on retrouve la comédienne française Emmanuelle Devos, qui se confiait pour nous sur cette expérience.

Dans la foulée sort Mambar Pierrette de Rosine Mbakam, découvert l’année précédente à la Quinzaine des Cinéastes à Cannes, remarquable portrait de femme hyper-réaliste, restituant avec le quotidien de sa protagoniste avec acuité et pertinence, s’appuyant sur le temps du travail, et la porte ouverte sur le monde que représente l’atelier de couture de Pierrette.

A lire: Mambar Pierrette, travail d’orfèvre

Le mois de janvier voit également la sortie du bouleversant documentaire de Bernard Bellefroid, Une des mille collines, où le cinéaste s’interroge s’interroge sur la façon dont un village peut encore faire communauté, quand victimes et agresseurs se côtoient au quotidien, à travers le destin de trois enfants assassinés lors du génocide rwandais.

Le 31 janvier, c’est un duo inédit de comédiens belges qui se partagent l’affiche du film du français Pierre Godeau, Sous le vent des Marquises. François Damiens et Salomé Dewaels y sont particulièrement émouvants dans les rôles d’un père et d’une fille qui renouent alors qu’il leur reste peu de temps. On les a rencontrés pour parler de ce film délicat.

A lire: Salomé Dewaels: « J’ai appris à me laisser surprendre »

FEVRIER

Le mois débute avec la sortie d’Amal de Jawad Rhalib, qui va rencontrer un très beau succès auprès du public. Il faut dire que le film aborde avec radicalité la question de la liberté d’enseigner, centrée autour du personnage d’une professeure de français, incarnée par Lubna Azabal, en lutte contre sa hiérarchie, les parents et mêmes ses élèves pour conserver son droit à aborder en classe les sujets qui l’animent. Elle fait notamment face à son collègue prof de religion, incarnée par Fabrizio Rongione, qui nous parlait de ce rôle.

A lire: Amal, passionnément engagée 

Dans la foulée sort le deuxième long métrage de Vivian Goffette, Les Poings serrés. Le film suit la trajectoire d’un jeune garçon, Lucien, qui cherche à comprendre qui est son père, un monstre aux yeux de la société. En cachette de sa mère, il revient donc son père, avide de croire en son pardon sincère. Le père est incarné par Laurent Capelluto, qui nous parlait alors de ce rôle complexe.

Février, un mois riche de sorties posant un regard acéré sur des problématiques éminemment actuelles, puisque le 21 février sort Quitter la nuit, premier long métrage de Delphine Girard, découvert quelques mois plus tôt au Festival de Venise, où le film avait remporté le Prix du public. La jeune cinéaste belge s’interroge sur l’après. Que se passe-t-il après un viol? Comment accompagne-t-on la victime? Quel chemin suit l’agresseur? Quel peut être le rôle des témoins, et quelle place la justice fait-elle à chacun·e? Et surtout, comment sortir de l’ombre pour retrouver la lumière, que ce soit celle de la vie ou de la vérité. Un film aussi juste que subtil, précieux pour mieux comprendre les mécanismes qui sous-tendent la culture du viol, et surtout, le silence dans lequel on enferme les victimes, porté par les performances saisissantes de Selma Alaoui et Veerle Baetens. Delphine Girard s’est prêtée pour nous au jeu des Rituels, notre podcast qui questionne les scénaristes belges sur leur rapport à l’écriture.

A lire: Quitter la nuit, et sortir de l’ombre

Last but definitely not least pour ce mois de février, la magnifique (et justifiée!) récompense décernée à Arieh Worthalter, César du Meilleur acteur pour Le Procès Goldman de Cédric Kahn, dont il nous parlait quelques mois plus tôt au Festival de Namur.

MARS

La saison des prix s’achève en beauté pour Dalva, la (super)-héroïne d’Emmanuelle Nicot, cette petite fille rescapée de l’inceste, que l’on voit se reconstruire sous le regard de la cinéaste, qui lui permet de devenir l’héroïne de sa propre histoire. Le film remporte pas moins de 7 prix lors de la 13e Cérémonie des Magritte, qui se tient le 10 mars. Retour ici sur le palmarès.

Ariel Worthalter toujours lui est justement à l’affiche de Chiennes de vie, le deuxième long métrage de Xavier Seron qui sort au mois de mars, une comédie mordante et chorale sur les relations sincères et mouvementées qui unissent l’homme, la femme, et son meilleur ami. Le film est servi par un casting de haute volée, puisqu’en plus d’Arieh Worthalter donc, on retrouve les excellentes Aurora Marion et Louise Manteau, ainsi que Jean-Jacques Rausin, Ninon Borsei et Mara Taquin qui se sont livrés pour nous à l’exercice périlleux de l’interview à trois.

A voir aussi: Chiennes de vie, rencontre avec Xavier Seron et Arieh Worthalter

Le mois de mars voit aussi le commencement d’une saison d’hommage à Chantal Akerman, dont l’oeuvre ne cesse de dévoiler ses richesses. Le 15 mars ouvre à Bozar une conséquente exposition, Travelling, doublée d’une rétrospective abritée par la Cinematek, et la ressortie de Golden Eighties accompagnée d’une exposition au Palace, et de la projection exceptionnelle au festival de Cannes d’un film moins connu mais néanmoins extraordinaire, Histoires d’Amérique: Food, Family and Philosophy.

AVRIL

En avril ne te découvre pas d’un fil, sauf peut-être pour découvrir Il pleut dans la maison, l’excellent et caniculaire premier long métrage de fiction de la jeune cinéaste Paloma Sermon-Daï primé à Cannes, déjà remarquée avec son premier long documentaire Petit Samedi, primé à Berlin, Bayard d’or du Meilleur film à Namur, à l’instar d’ailleurs d’Il pleut dans la maison, qui fait de la cinéaste la première à remporter deux fois cette récompense à trois années d’intervalle. Le film dresse la chronique sensible et naturaliste du dernier été de l’enfance d’un frère et une soeur, projetés malgré eux dans le monde adulte, incarnés avec une justesse bouleversante par Makenzy et Purdey Lombet, frère et soeur à la vie et à l’écran.

A lire: Il pleut dans la maison, le dernier été

Comme Delphine Girard, mais aussi comme cette année Eve Duchemin, Zeno Graton, Claude Schmitz, Rosine Mbakam et Benoît Mariage, la jeune autrice s’est prêtée au jeu de nos Rituels pour se confier sur son singulier rapport à l’écriture.

Ce mois d’avril sort également Les Pas perdus, de Roda Fawaz et Thibaut Wohlfahrt, qui le temps d’une journée, nous plonge dans les méandres d’un tribunal, au coeur d’un Palais de Justice quelque part en Belgique. Le tribunal, lieu monde qui abrite autant de destins hétérogènes, tout un univers, un conglomérat de peines, de souffrances, d’espoirs, de révoltes, de nouveaux départs aussi, peut-être. Un lieu qui condense aussi les grandes questions qui traversent nos sociétés. Toute une mécanique, froide comme la justice, que les auteurs entreprennent de réchauffer en y injectant autant d’humanité que d’humains qui la traversent.

A lire: Les Pas perdus, un jour au tribunal

MAI

Qui dit mai dit Festival de Cannes. Au programme belge des festivités cette année, la présentation, à la Semaine de la Critique, du premier long métrage du jeune cinéaste flamand Leonard van Dijl, Julie Zwijgt, sorti à l’automne dans les salles belges. Sur la Croisette, on croise l’équipe du film, qui se confie sur cette expérience hors du commun.

Mais en ce mois de mai 2024 sortent également deux long métrages belges qui chacun ose la comédie sur des sujets pourtant dramatiques, que ce soit la fin d’un amour pour Les Tortues, ou la maladie d’Alzheimer pour Retro Therapy.

Dans Les Tortues, David Lambert revisite la comédie du remariage pour en proposer une version queer et bruxelloise, qui nous interroge: l’amour est-il soluble dans la retraite? Dans les rôles principaux de cette histoire d’amour qui bat de l’aile entre un brocanteur et un gendarme tout juste retraités, le cinéaste belge fait l’audacieux pari d’un casting qui fleure bon le cinéma social tendance Dardenne/ Ken Loach: Dave Johns, inoubliable Daniel Blake, et Olivier Gourmet, que l’on ne présente bien sûr plus. Ce dernier nous parle ici de ce rôle disruptif qui vient pourtant s’inscrire dans sa filmographie comme un cerne supplémentaire au tronc d’un arbre, tandis que David Lambert lui se penche sur ce projet qui lui tient à coeur.

On retrouve Olivier Gourmet dans Retro Therapy, premier long métrage de fiction de la regrettée Elodie Lelu, qui nous a quittés cet été des suites d’une maladie. Dans ce film, elle imagine la thérapie douce qu’une petite-fille et son père mettent en place pour accompagner sa grand-mère, atteinte d’Alzheimer: entrer dans son jeu, et incarner pour elle sa propre fille, disparue trop tôt, quitte à voyager dans le temps, et remonter dans les années 90. Yvonne est incarnée par Hélène Vincent, tandis que c’est la jeune Fantine Harduin qui prête ses traits à Manon. A l’occasion de la sortie du film, la jeune comédienne et la cinéaste nous parlaient de cette comédie douce-amère et familiale.

JUIN

A quelques encablures de la pause estivale, Adil El Arbi et Bilall Fallah reviennent avec leur sens du blockbuster pour présenter Bad Boys: Die or Ride, la suite des aventures de Mike et Marcus, aka Will Smith et Martin Lawrence, un nouvel opus décoiffant, qui fonce à toute allure sur la route du succès.

Le mois de juin, c’est aussi le retour attendu du Brussels International Film Festival, et son lot de films belges inédits, présentés dans la Compétition nationale, parmi lesquels Sauve qui peut, Les Miennes et Les Enfants perdus, sortis à l’automne dont on reparlera dans la deuxième partie de cette rétrospective, mais aussi des documentaires inédits et de belles découvertes comme Yalla Baba d’Angie Obeid, ou encore D’Abdul à Leila de Leila Albayaty.

A lire: D’Abdul à Leila: récit de soi chanté et dessiné

A lire: Yalla, Baba! Road-trip entre père et fille

>>> Suite de la rétrospective la semaine prochaine!

 

 

 

 

 

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