Avec Ce qui nous lie, son premier long métrage documentaire, Sonam Larcin se penche sur ce qui fait le corps et le coeur de la relation qui unit parents et enfants.
« Je me souviens que quand j’étais petit, je rêvais de fonder une famille avec plein d’enfants. » Ainsi commence le voyage entamé par Sonam Larcin dans Ce qui nous lie, exploration des sentiments parentaux et filiaux, et de ce qui au plus profond de nous, fait famille. Car ce rêve va se heurter pour le cinéaste aux conditions de son accomplissement. Comment, en tant que couple homosexuel, envisage-t-on aujourd’hui l’odyssée de la parentalité? Quels sont les moyens existants, les chemins à suivre, les rencontres possibles?
Explorant tout à la fois les spécificités de l’homoparentalité, et son propre rapport au père, le cinéaste questionne les idées préconçues et autres idées toutes faites qui façonne notre regard sur ce que représente le fait d’être parent. Ce verbe « être » se retrouve d’ailleurs au coeur de sa réflexion, en opposition au fait « d’avoir » ou de « faire » un enfant. La parentalité est avant tout un état, avant d’être une action, une condition ou même une possession.
Sur son chemin, les couples homoparentaux qui ont fait le choix d’une procréation pour autrui se livrent sur l’aspect génétique de la parentalité, tout comme l’une de ses amies, interrogée sur le don d’ovocyte. Quid du lien biologique, qu’est-ce qui fait famille, les gènes? Mais alors pourquoi tant de parents génétiques sont-ils absents quand ceux du coeur, et du quotidien sont présents? Peut-il y avoir une asymétrie dans la parentalité?
C’est aussi la place de l’enfantement qui est observée. Le film se penche sur la part de la pression sociale dans le fait de faire famille, mais aussi sur le sentiment du « devoir de reproduction », celui qui sert à préserver la continuité de l’arbre généalogique.
Cette réflexion ouverte sur la parentalité est rythmée tout au long du film par les retrouvailles entre le cinéaste et son propre père, un père finalement absent car intermittent, que le jeune garçon voit sporadiquement. Le vieil homme se confie, d’abord avec pudeur, puis avec une émouvante sincérité, sur cette difficulté à créer le fameux lien quand on se croise tous les 15 jours. « Le courant ne passait pas », se souvient-il, « on n’avait pas eu le temps de créer des choses ». N’empêche que ce lien parfois, souvent indéfectible, est aussi un lien évolutif, un lien souple comme un roseau, que père et fils vont réactiver à la faveur d’un échange, de l’ouverture d’un dialogue qui va contribuer à donner corps et coeur à la relation. Y poser des mots permettra de lui donner de l’épaisseur.
Ce double mouvement exploratoire de Ce qui nous lie dresse un portrait sensible et émouvant de ce que peut vouloir dire faire famille aujourd’hui.