Pas drôle d’être tout le temps malade.
Pas drôle non plus de… se croire tout le temps malade. Surtout pour l’entourage qui doit supporter vos irritants gémissements de votre hypocondrie égoïste. On ne parle même pas du budget de la sécu qui ne vous dit pas merci. Et nous non plus par voie d’extension.
Alerte ! Les hypocondriaques sont parmi nous, persuadés qu’ils ont contracté la peste au moindre bouton de fièvre. Chez eux, un frisson est une grippe, un orteil foulé, une triple fracture qui nécessite une hospitalisation. Si d’aventure, le cœur manque un battement, c’est la crise d’hystérie assurée.
Terrorisés, ils cherchent à évaluer la gravité de leurs symptômes sur le net, passent l’essentiel de leurs soirées aux urgences et se lient parfois d’amitié avec leur médecin condescendant qui voit là un revenu assuré à peu de risque.
A bientôt 40 ans, Romain n’a ni femme ni enfant. Il n’est pas moche, il n’est pas sinistre. Il est juste… chiant !
Cet hypocondriaque de compétition, névropathe peureux, exerce en plus un métier qui n’est pas fait pour arranger son malaise : il est photographe pour un dictionnaire médical en ligne. De quoi alimenter jusqu’à l’obésité ses incessantes angoisses.
Par la force des choses et celle de l’habitude, son seul ami est donc son médecin traitant. Bon bougre, le Docteur Dimitri Zvenska l’a pris en affection, mais plus le temps passe et plus il regrette. Loin de se raisonner, le malade imaginaire devient de plus en plus difficile à gérer.
Pour se débarrasser en douceur de l’envahissant Romain qui commence à lui pourrir sa vie de couple, le docteur Zvenska se met en tête de l’aider à trouver la femme de sa vie. Il l’invite à des soirées chez lui, l’inscrit sur un site de rencontres, l’oblige à faire du sport, le coache sur la manière de séduire et de se comporter avec les femmes. Mais découvrir la perle rare qui sera capable de le supporter et qui, par amour, l’amènera à surmonter enfin son hypocondrie s’avère plus ardu que prévu…
Pour son quatrième long métrage en tant que réalisateur Dany Boon s’est déniché un sujet en or. En prime, il se paie le luxe de reformer avec Kad Merad le duo mythique de Bienvenue chez les Chtis, plus gros succès du cinéma français avec 20.483.303 entrées payantes enregistrées. Soit un bon million de plus qu’Intouchables. Et 12 de plus que Rien à déclarer que certains ont, dès lors, considéré comme un échec.
Mais des échecs à plus de huit millions de spectateurs, la totalité des producteurs français aimerait en essuyer plusieurs chaque année.
Si nous abordons ici Supercondriaque, c’est naturellement que, comme Rien à déclarer, il a été largement coproduit en Belgique où de nombreuses scènes ont été tournées.
Après avoir géré le tournage de Möbius, Artemis (Patrick Quinet) a pris en charge la production belge de ce nouveau blockbuster espéré qui a naturellement permis à de nombreux opérateurs belges de travailler sur le projet pour un investissement total de près d’un million d’euros. Pas mal pour les techniciens et l’industrie technique belges. Très bien aussi pour de nombreux acteurs castés par Patrick Hella qui ont trouvé leur place sur le tournage : Cécile Delberghe, Hélène Couvert, Laurie Degand, Fabrice Boutique, Flora Thomas, Jean-Yves Girin, Philippe Rasse, Thomas Stuyck, Gudule, Christelle Delbrouck, Andreas Perschewski et Stéphane De Groodt qui incarne ici l’avocat de Dany Boon avec qui il sympathisera au point que le comique français lui proposera de produire son court métrage et de jouer dedans.
Présenté hors compétition en ouverture du festival de comédie de l’Alpe d’Huez, Supercondriaque a naturellement fait salle comble. Dany Boon qui était le président du jury de la manifestation (où il retrouvait Stéphane De Groodt) y a également remporté le 1er Prix Isère qui sera remis chaque année durant le Festival, à un talent de la comédie.
Le prix récompense une personnalité, un acteur, un réalisateur, un scénariste dont le talent a marqué, a fait rire, sourire des millions de spectateurs et a permis le temps d’un film, par la force du média « cinéma » de faire oublier avec la comédie et l’humour, le quotidien et la morosité… Le moins qu’on puisse dire est que son premier récipiendaire est légitime.
Supercondriaque s’appuie sur une mécanique assez différente des deux derniers grands succès de Dany Boon: Rien à déclarer et le plus récent Eyjafjallajökull.
Dans le premier, qui reluquait vers les comédies des années 60, Dany Boon était entouré d’une kyrielle d’acteurs comiques (parmi lesquels de nombreux Belges hilarants). Dans la course-poursuite tissée autour de l’éruption du volcan islandais, il partageait la tête d’affiche avec une Valérie Bonneton en top forme sur un canevas direct et sans faux-fuyant.
Ici, il est globalement seul à assurer la partie comique du film; les autres acteurs, autour de lui, jouant par contraste assez sérieusement. Les fans du comédien seront néanmoins ravis de le voir s’agiter comme jamais, dans un registre proche de ses one-man shows.
Le thème, très tendance, captera-t-il l’attention du public? Les retrouvailles de Kad Merad et Dany Boon donneront-elles aux spectateurs des vapeurs Ch’tis?
Selon toute vraisemblance, Supercondriaque (parrainé, ce n’est pas une blague, par un véritable produit antibactérien) devrait trouver sa place dans la galerie des succès de Dany Boon, acteur, des films qui tournent généralement autour de la barre du million et demi d’entrées en France.
Programmé le 26 février pour une sortie juste avant les congés de carnaval, date stratégique s’il en est pour ce type de comédies grand public, Supercondriaque se retrouvera face à un autre géant coproduit en Belgique… le film d’animation Minuscule qui bouscule actuellement le box-office français et dont nous parlerons bientôt.