Benoit revient au cinéma
Un Mariage, pas d’enterrement.

Benoit Mariage. Le nom du réalisateur namurois résonne comme une promesse de bonheur à l’oreille des cinéphiles belges. Révélé par Le Signaleur, un court métrage forcément historique puisqu’il réunissait avant leur heure de gloire Benoit Poelvoorde et Olivier Gourmet, Benoit confirma assez rapidement les bonnes dispositions qu’on lui prêtait avec un formidable premier long métrage, drôle et émouvant, surréaliste; servi par l’interprétation exceptionnelle d’un Benoit Poelvoorde au sommet de son art. Les Convoyeurs Attendent et son concours de porte qu’on ouvre et qu’on ferme est aujourd’hui entré dans les annales du cinéma. Bouli Lanners en entraîneur débonnaire aussi.

 

[Benoit Poelvoorde dans CowBoy]


On le croyait donc parti vers les cîmes, mais le grave échec commercial de L’Autre, son film suivant, très intimiste et un Cow-Boy tiraillé entre la vision du metteur en scène et celle des producteurs stoppa net la belle envolée. S’enchaînèrent alors des problèmes personnels et un blues, plus facile à exploiter pour certains musiciens que pour un réalisateur censé inventer un univers et diriger une équipe. La trop longue éclipse devrait heureusement trouver une fin rapide puisque, c’est décidé et officiel, Benoit revient sur les plateaux avec un scénario original et un enthousiasme retrouvé. Quel plaisir !

 

–          Oui, c’est vrai, depuis Cow-Boy on ne m’a pas vu beaucoup. J’enseigne à l’IAD, j’ai tourné des pubs, et aussi un film sur Bouli Lanners pendant cet été (on le découvrira au Be Film festival le 21 décembre à 19h30, ndlr). J’ai participé à l’écriture de deux ou trois scénarios et puis voilà… C’était une période un peu difficile pour moi, mais là ça repart bien. À un moment, il faut savoir dans quel créneau on est plus ou moins opérationnel. Pour moi, je crois que c’est dans cette tradition de cinéma à l’Italienne entre l’ironie, les larmes et le rire. Un peu ce que j’avais déjà fait dans Les Convoyeurs Attendent. Je suis donc revenu assez naturellement à cela, sans spéculations.

 

Le film raconte les tribulations d’un manager de football belge qui va prospecter en Côte d’Ivoire et tombe sur un gamin de la rue qui s’avère être un footballeur doué. La première partie du film se déroule là-bas, la deuxième ici quand le joueur vient tenter sa chance en Belgique. Et puis il y a une troisième partie, en Afrique encore. C’est un peu comme les spectacles de notre enfance: une première partie, rideau, une deuxième, rideau et une troisième. Je tenais vraiment à ce découpage qui a tout son sens ici.

 

Après, on est bien sûr rattrapé par ses histoires: c’est donc également un film sur la paternité et sur la rencontre, ou la non-rencontre entre une société d’opulence, notre Europe et une société de survie où les codes moraux ne sont pas les mêmes ce qui implique quelques questions : comment s’entendre, comment conclure un accord, comment parfois louper la rencontre, aussi ? Comme je le disais tout à l’heure, ce sera drôle, parfois grinçant, très ironique plutôt que cynique, car je trouve que le cynisme est un peu la négation de la vie.

 

J’ai pris beaucoup de plaisir à écrire le film, car je suis parti en Afrique avec un manager de foot qui est devenu un ami et qui est très loin de l’image du négrier qu’on peut avoir en pensant aux agents actuels. C’est un ancien journaliste du Soir qui s’appelle Serge Trimpont. Il s’est pris de passion pour la Côte d’Ivoire et a créé des écoles de foot de rues à Abidjan, a sorti une star comme Aruna Dindane et d’autres grands joueurs comme Cheik Tiote, par exemple.

 

Petite parenthèse à destination de ceux qui ne sont pas à la fois fans de cinéma et de football : Aruna Dindane après des débuts en Côte d’Ivoire est arrivé à Anderlecht où il a joué cinq ans et est devenu une vedette convoitée. L’an dernier, il évoluait à Porthmouth en Angleterre et vient de partir finir sa carrière au Qatar, histoire de se composer une épargne pension confortable. Quant à Tioté, lui aussi arrivé en Europe à Anderlecht, il est ensuite parti aux Pays-Bas et évolue actuellement dans l’excellente équipe de Newcastle, surprise du championnat anglais. Il y a signé jusqu’en… 2017, preuve qu’on tient particulièrement à lui.

 

–          Serge Trimpont est un personnage truculent. Il a écrit une biographie de Raymond Goethals ce qui n’est pas étonnant : c’est un peu un Goethals; lui-même. C’est un Bruxellois de Koekelberg, un vrai de vrai. C’est un gars que j’aime beaucoup. Son énergie et son rapport à l’Afrique m’ont inspiré ce film. Je lui dois donc énormément et il va d’ailleurs venir nous aider à le tourner.

 

A ce stade du récit, on se demande à qui le réalisateur a pensé pour son rôle principal. Comme on sait que Benoit Poelvoorde tournera Une Place sur Terre début 2012, que Bouli Lanners a une année d’enfer, et quand on sait Benoit Mariage est un, homme très fidèle en amitié, on a bien une petite idée. Immédiatement confirmée.

 

–          C’est François Damiens qui incarnera le manager et j’ai déniché un excellent acteur pour le joueur africain. C’est un jeune comédien belge d’origine congolaise qui s’appelle Marc Zinga. Il vient de faire un téléfilm consacré au mercenaire Bob Denard où il incarnait Mobutu aux côtés de Clovis Cornillac (photo ci-contre)

 

Pour les connaisseurs, Marc est aussi le chanteur du groupe bruxellois The Peas Project. Il a participé à des courts et longs métrages dirigés par Maxime Pistorio, Jaco Van Dormael ou Vincent Lannoo.

 

–          Le scénario est écrit et je le retravaille avec Stefan Liberski pour avoir un regard extérieur avisé toujours très intéressant. Ce sera produit par Boris Van Gils et Michael Goldberg.

 

De nouveaux producteurs, donc. Après la fin difficile de l’aventure Cow-Boy, on s’en doutait un peu. Ce choix s’avère d’autant plus pertinent que le duo Van Gils – Goldberg vient de produire Viva Riva qualifié par certains critiques africains de « meilleur long-métrage jamais produit au Congo ». Entièrement tourné à Kinshasa, Viva Riva évoque les gangs et les trafiquants de drogue dans la capitale du Congo dans  un style survitaminé assez étonnant pour un film africain. Résultat, Djo Tunda wa Munga, le réalisateur qui était  en compétition pour 12 trophées aux Oscars du cinéma africain en a remporté six : meilleur film, meilleur réalisateur, meilleure cinématographie, meilleur acteur dans un second rôle, meilleure actrice dans un second rôle et… meilleure production ! Bien vu Benoit !

 

 

–          Ce sera un film très contemporain, ça ne parle pas que de foot, mais de rapports nord-sud, et de cette mondialisation qui est devenue incontournable aujourd’hui. Je suis très heureux de ce scénario et j’espère que je parviendrai à lui rendre justice sur l’écran.

 

Début du tournage en mars, en Côte d’Ivoire. RV est pris. On en reparle, c’est entendu !

 

 

[les photos de Benoit sont signées Marianne Grimont]

 

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