2013/2014 : Vivian Goffette

Moi qui déteste courir, 2013 m’a fait ressentir l’émotion d’un coureur de fond qui passe la ligne d’arrivée de son premier marathon. J’ai relevé la tête, essoufflé, à bout de force, hébété : Yam Dam mon premier long métrage est là, sur l’écran. Je suis un peu perdu, je ne sais plus vraiment comment j’en suis arrivé là, ni où je suis placé…

Le film « tient-il la distance »? Sera-t-il bien reçu ? Aucune idée, je n’ai en tête que les faits de course, là où j’ai trébuché, là où j’ai pris la mauvaise voie, là où au contraire je suis peut-être parvenu à éviter un piège.

 

Autour de moi, tous mes amis : producteurs, techniciens, comédiens, figurants, propriétaires des lieux de tournage, bref tous ceux qui ont couru ce marathon avec moi et m’ont soutenu jusqu’au bout.

 

Je lis sur leur visage un mélange de curiosité et d’inquiétude. La salle plonge dans le noir, le film commence… L’impression de recommencer le marathon au début, c’est interminable. Douloureux. Lorsque la lumière se rallume, je crois percevoir chez eux un soulagement, et même une certaine fierté : ils n’ont pas couru pour rien… On peut faire la fête, enfin.

 

 

Reste l’autre public, le « vrai », celui qui s’assied dans un siège de cinéma comme il s’accoude à une barrière Nadar pour admirer l’effort de sportifs pour la plupart anonymes. S’intéressera-t-il à « Yam Dam » dans le flot continu des coureurs?

 

La bonne nouvelle vient de Montréal où le film est sélectionné au Festival des Films du Monde. C’est déjà une victoire. L’accueil du public est extraordinaire. C’est une autre victoire. Puis il y a le Fiff à Namur où le film est très bien reçu et où, surprise, Yam Dam monte sur le podium : Prix Cinevox !

 

Toute l’équipe se met à rêver : Yam Dam, ce film fait « à l’arrache » et « à l’amitié », sans stars ni explosions aura peut-être sa (petite) place sur les écrans de la ville ?

 

Arrête de rêver, petit, arrête : tu n’as ni stars ni explosions, ça n’intéressera personne, on t’a dit. Et tu n’es que 573e au Marathon des sorties, circulez, y’aura rien à voir…

 

Le public des festivals ?

Ce n’est pas un public, ça, mon petit Monsieur ce sont des cinéphiles…

Ah, bon, excusez-moi, je savais pas…

 

 

La course doit reprendre, l’arrivée et les podiums n’étaient-ils qu’un rêve, qu’une illusion, un simple ravitaillement ? Il faut continuer…

Et 2014 a déjà commencé son décompte… La piste passe par le Ciné Patria de Virton, Les Grignoux à Sauvenière, le Plaza Art à Mons…

Des cinémas pour cinéphile alors… C’est plutôt bien non ?

Faut rejoindre Bruxelles maintenant, trouver une salle, convaincre, avoir un peu de « presse »…

 

La course n’est pas finie pour Yam Dam, tant qu’il n’aura pas eu sa chance, il faudra l’accompagner. De course en course.

De festival en festival. Yam Dam revient à peine du Bénin avec le Python Royal (Grand Prix du Festival) dans ses bagages, il lui faut déjà repartir pour Louxor en passant par Moustier ou Vancouver…

 

Fort de cette aventure qui n’en finit plus, je me sens pourtant plus léger en ce début d’année et rêve déjà d’un nouveau marathon : reprendre « Le droit chemin », ce projet qui me tient à cœur depuis longtemps, avant même Yam Dam. Je veux le réécrire, le remodeler, lui faire profiter de l’expérience acquise. Car maintenant, enfin, je me sens prêt pour la course…

Ah, encore un rêve pour 2014, encore plus grand, encore plus fou : que la Belgique continue à soutenir ses artistes et à leur permettre de survivre tout en exerçant leur art…

 

 

Vivian Goffette

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